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Le triste exemple de M. l’abbé Delagneau…

par | Nov 14, 2015 | Abbé Rioult

15 nov. Delagneau

L’abbé Delagneau est le prieur et le directeur d’une maison d’exercices spirituels de la FSSPX au prieuré de Notre-Dame du Pointet. Son Bulletin (Oct.-Déc. 2015) expose quelques vérités mêlées à beaucoup de fausseté et illustre une nouvelle fois l’état intellectuel et moral de la FSSPX.

L’abbé Delagneau s’inquiète de la baisse notable des rentrées au séminaire de Flavigny. Il en cherche les causes.

La première vient de ce que « dans trop de famille, on critique le prêtre… devant les enfants… » Cette remarque exigerait des nuances qui ne sont pas faites, mais notons que depuis la révolution conciliaire, les familles attachées à la Tradition catholique n’ont jamais cessé de dénoncer les clercs et les évêques félons et cela n’a point empêché par le passé de nombreuses vocations sacerdotales.

La deuxième cause vient d’une « éducation qui manque de virilité. » Ce paragraphe est juste tout comme le suivant qui aborde « l’influence du monde ».

« Les vilains méchants »…

Puis notre prieur analyse une quatrième cause : « les troubles occasionnés par ceux que l’on appelle “les résistants” et qui font perdre la confiance en la Fraternité. »

Il y a là une grossière manipulation. Il existe en effet un trouble qui nuit à la Fraternité, mais il vient d’une politique ambiguë, fausse, mensongère de la part de Mgr Fellay et de Menzingen. Et cette politique insensée et impie se manifeste de plus en plus effrontément.

Le 17 mars 2015, en effet, le gouvernement argentin a reconnu la Fraternité Saint-Pie X en tant qu’association de droit diocésain, jouissant des privilèges que l’État accorde aux organisations reconnues en vertu du canon 298 du nouveau code de droit canonique. On sait aussi que l’archevêque de Buenos Aires a agi à la demande de François.

Le 5 juin 2015, la Congrégation pour la doctrine de la Foi a accordé à Mgr Fellay, en qualité de supérieur général de la Fraternité Saint-Pie X, les pouvoirs de juge de première instance dans un procès canonique concernant un prêtre de la Fraternité…

Le 1er septembre 2015, dans une lettre adressée au “Président du Conseil Pontifical pour la promotion de la nouvelle Évangélisation”, François a déclaré que, durant “l’Année Sainte de la Miséricorde” qui commémore le 50ème anniversaire de la clôture du Concile Vatican II, les prêtres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X auront les pouvoirs pour confesser tous les fidèles qui recourront à leur ministère, de telle sorte que les absolutions sacramentelles par eux administrées seront valides et licites.

Ce qui avait été impossible avec le “théologien” moderniste Benoît XVI devient réalité avec le “pasteur” moderniste François.

Or, la reconnaissance canonique de la Fraternité Saint-Pie X, lente ou rapide, unilatérale ou pas, avec conditions ou sans, par la Rome moderniste est une trahison et un suicide.

Il y a vingt ans, Mgr Fellay écrivait aux membres de sa Société ce qui suit :

« Il faudra s’attendre à ce que Rome essaie de nous faire entrer dans l’amalgame universaliste, où on finirait par nous offrir une place “parmi les autres”… On peut bien penser que la tentation de rentrer dans “l’officialité” pourra être grande, à proportion des offres que la Rome œcuméniste pourra nous faire ; refusant alors d’entrer dans ce jeu de confusion, nous passerons pour les vilains méchants. »; « Que l’on fuie comme la peste le désir de prélature, souffle du monde qui jaillit de l’orgueil et du manque d’esprit de foi. »

Aujourd’hui « les vilains méchants » qui refusent « d’entrer dans ce jeu de confusion », on les appelle les “résistants”.

Rien n’a changé…

L’abbé Delagneau a ensuite l’impudence d’écrire : « Aucun supérieur ne nous a demandé de changer notre prédication […]. Quant aux accords avec Rome, s’il y en a un jour, nous les examinerons et nous aurons la grâce pour faire notre devoir de catholiques à ce moment-là. »

Celui qui a osé écrire ce paragraphe n’est autre que l’abbé Delagneau qui a interdit à un de ses vicaires de citer Mgr Lefebvre en sermon pour ne pas se démarquer de la prédication des autres prêtres du prieuré… Imaginez un supérieur dominicain interdisant de citer saint Dominique en sermon et qui conclurait sans scrupule que rien n’a changé dans l’Ordre dominicain… Ne penseriez-vous qu’il se moque de vous ?

Et si comme le prétend faussement l’abbé Delagneau « aucun supérieur ne nous a demandé de changer notre prédication », qui pourra empêcher un supérieur de censurer selon ses caprices une prédication qui lui déplait comme le sermon de l’abbé de La Rocque qui n’était pas parfait mais qui avait le mérite de conclure à l’impossibilité de participer au Jubilé de la miséricorde de François ? Son sermon n’a pas duré six heures sur la Porte Latine ! Il est donc parfaitement stupide, vu tous les faits inquiétants et scandaleux depuis 2012, d’exhorter à la patience. La grâce d’aujourd’hui suffit à constater la construction d’un mur dont le but est de nous enfermer. Et l’abbé Delagneau nous dit gravement d’attendre d’être pris au piège pour commencer à réfléchir sur une hypothétique réaction…

Optimisme ou aveuglement ?

Une autre remarque inquiétante est celle-ci : « Nous ne sommes pas à la veille de la fin du monde que je sache ! Il faut que nous soyons prêts à transmettre la grande richesse de la Tradition, quand le Bon Dieu le voudra. » Nous ne savons ce qu’il y a de plus affligeant dans ce jugement : l’irréalisme ou la présomption ? Une telle pensée ne peut pas rester sans conséquence et explique en grande partie la décadence intellectuelle de la FSSPX.

L’abbé Delagneau écrit ensuite une juste réflexion sans voir qu’elle s’applique aussi à la FSSPX et plus encore à Mgr Fellay : « Certains mouvements gardent la messe et les sacrements traditionnels, mais ne dénoncent pas les erreurs qui mettent en danger la pureté de la foi et de la morale. »

Une seule question se pose : l’abbé Delagneau est-il en mesure de produire un seul communiqué officiel de sa Fraternité, depuis l’an 2000, qui condamne et les erreurs et les fauteurs d’erreurs ? Il peut chercher, ce sera en vain… Même pour la scandaleuse et pseudo canonisation de Jean-Paul II, la Fraternité n’a pas osé agir publiquement en la condamnant officiellement et en réprouvant l’auteur de cette imposture.

Absence de spiritualité forte

L’abbé Delagneau fait aussi une pitoyable remarque au sujet de la « confiance ou obéissance ? » Pour lui, « en pratique, j’obéis à une autorité parce que, par elle, je connais la sainte volonté de Dieu, et non parce que j’estime ou je fais confiance à cette autorité. »

Ces lignes dénotent une spiritualité faussée par un surnaturalisme destructeur de l’ordre naturel.

Mgr Lefebvre considérait le père Calmel et le père Emmanuel comme les « deux grands auteurs spirituels de notre temps » : « Ils sont profondément thomistes, cela donne une assise solide à leur spiritualité, à la différence d’autres auteurs influencés par Saint-Sulpice, tel Libermann. Avec ces derniers, on risque de tomber dans le sentimentalisme ou le volontarisme ou le pacifisme. A cause de cela, le clergé était prêt à tomber au moment de la crise, il lui manquait une spiritualité forte. » (Bernard Tissier de Mallerais, Marcel Lefebvre, Clovis, p. 604).

Force est de constater qu’il manque à l’abbé Delagneau une spiritualité forte. Le Père Calmel écrivait en effet ce qui suit au sujet des exhortations à la soumission à l’autorité : « les traités de spiritualité en sont pleins… Les traités spirituels ne nous enseignent à peu près rien sur les formes révolutionnaires de l’exercice de l’autorité ni, par suite, sur la pratique de l’obéissance dans cette situation sans précédent… nous sommes en dehors des catégories ordinaires de la désobéissance ou de l’obéissance. […] Je ne m’exempte pas de l’obéissance, mais je ne veux pas non plus m’entraver dans une conception fausse et même absurde de la vertu d’obéissance. Je n’obéis pas à un processus de démolition, mais aux lois toujours valables qui furent portées régulièrement… l’obligation d’obéir n’existe pas à l’égard du système monté par la Révolution, quelle que soit l’autorité officielle qui la patronne. » (Itinéraire n° 148)

L’abbé Delagneau oublie que Mgr Fellay, par ses positions, favorise le processus révolutionnaire, qu’il a assumé et assume toujours intellectuellement sa déclaration du 15 avril 2012 qui entérinait la légitimité de la messe de Paul VI et la continuité magistérielle du concile Vatican II ! Libre à lui de jouer à la roulette russe en obéissant à un tel supérieur. Mais il pourrait, avec un peu de bonne volonté, accepter que certains ne désirent point être complice du « processus de démolition » en cour.

Faux et malhonnête

Mais le paragraphe le plus manifestement faux et malhonnête est le suivant :

« Plutôt que de juger, de critiquer nos supérieurs, prions pour eux […]. Et n’arguons pas du motif de foi quand nous voyons les choses autrement, alors que l’on ne nous demande en rien de diminuer notre foi ou de commettre un péché. »

Depuis 10 ans, Mgr Fellay pond des communiqués mensongers, n’arrête pas de dire “merci” à Benoît comme à François, brille par son scandaleux silence sur les incessants scandales romains, se trompe dans ses écrits, fouille dans les boites courriels des prêtres opposés à son inacceptable diplomatie, opère des mutations surprenantes pour le bien commun, chasse injustement des confrères… mais tout va bien puisque « l’on ne nous demande en rien de diminuer notre foi ».

L’abbé Delagneau laisse aussi à entendre que son malfaiteur de supérieur ne lui a rien demandé, mais cela est faux. Une chose, une seule, lui a été imposée : son silence ! Tous les prêtres opposés à la folle politique de Mgr Fellay peuvent rester dans la FSSPX, à une condition : ne rien dire publiquement. C’est cette seule condition que Mgr Fellay a tenté d’imposer à M. l’abbé Picot pour rester dans la FSSPX : ne jamais dénoncer publiquement les méfaits publics de Mgr Fellay, de l’abbé Pfluger ou de l’abbé Nély…

Il y a une loi tacite qui oblige donc les prêtres à étouffer leur conscience et à se taire publiquement. Bref, dans la FSSPX, on vous oblige à être des chiens muets. Or ceci est inacceptable car immorale. Le confesseur des retraites Saint Ignace aurait-il oublié l’existence des péchés par omission ?

Un classique de la manipulation

Dernière remarque. L’abbé Delagneau finit sa petite prose par un refrain qui est devenu un classique de la manipulation : « Nous sommes toujours sur la ligne de crête tracée par Mgr Lefebvre : ni moderniste ni sédévacantiste. »

Tout d’abord, la ligne de crête de Mgr Lefebvre était à l’origine : « ni schismatique ni hérétique ». Le changement de mots trahit un changement de combat…

Ensuite, il est vrai que l’hypothèse sédévacantiste n’a jamais eu les faveurs de Mgr Lefebvre. Mais il a par ailleurs aussi déclaré ceci : « Ça ne veut pas dire pour autant que je sois absolument certain d’avoir raison dans la position que je prends… je n’ai pas la prétention d’être infaillible… dans les différentes hypothèses théologiques, ça devient très difficile… très délicat. » Mgr Lefebvre est même allé jusqu’à dire une fois que l’hypothèse de la déchéance du pape « hérétique, schismatique ou abandonnant pratiquement sa charge de Pasteur suprême » est une « hypothèse » qui pourra être « un jour confirmée par l’Église. Car elle a pour elle des arguments sérieux. »[1]

Il a encore déclaré ceci : « Alors, quel est ce pape ?… Moi, je ne sais plus quoi vous dire, vraiment… je ne sais pas… Mais en tout cas il est inspiré par le diable quand il fait ça… Il n’est pas inspiré par l’Esprit-Saint, ce n’est pas possible… Il est inspiré par le diable, et au service de la Maçonnerie, c’est évident. La Maçonnerie a toujours rêvé de ça : la réunion de toutes les religions. »[2]

Mais il a surtout déclaré en quoi consistait sa ligne après les sacres :

« En supposant que d’ici à un certain temps Rome fasse un appel, qu’on veuille nous revoir, à ce moment-là, c’est moi qui poserais les conditions. Je n’accepterai plus d’être dans la situation où nous nous sommes trouvés lors des colloques. C’est fini. Je poserais la question au plan doctrinal… Est-ce que vous êtes pour le règne social de Notre Seigneur Jésus-Christ ? Si vous n’acceptez pas la doctrine de vos prédécesseurs, il est inutile de parler. Tant que vous n’aurez pas accepté de réformer le Concile en considérant la doctrine de ces papes qui vous ont précédés, il n’y a pas de dialogue possible. C’est inutile. Les positions seraient ainsi plus claires. »[3]

L’imposture de Mgr Fellay et de l’abbé Delagneau saute aux yeux quand on relit le testament spirituel de Mgr Lefebvre : « C’est donc un devoir strict pour tout prêtre (et tout fidèle) voulant demeurer catholique de se séparer de cette Église conciliaire, tant qu’elle ne retrouvera pas la tradition du magistère de l’Église et de la foi catholique. »[4]

L’usage discréditant du sédévacantiste est d’autant plus misérable de la part de la FSSPX, que cet argument est avant tout hypocrite et utilitaire, une sorte de faux principe à géométrie variable. La FSSPX a certes chassé certains prêtres non una cum de sa Société, mais elle ne les a pas tous chassés.

Mgr Fellay ment quand il écrit que « la Fraternité Saint-Pie X réaffirme que l’état actuel de nécessité dans l’Eglise légitime son apostolat de par le monde, sans la dispenser de reconnaître les autorités ecclésiastiques pour lesquelles ses prêtres prient à chaque messe. »[5]

Mgr Fellay a en effet autorisé lui-même un de ses prêtres, toujours en poste, à être non una cum, c’est-à-dire à ne pas prier pour « les autorités ecclésiastiques à chaque messe » pour la simple raison que ce prêtre, et il a de bonnes raisons pour cela, ne les considère plus comme “Autorité”. À l’époque Mgr Fellay lui disait comprendre ce choix… Et ce cas n’est pas isolé. La Sapinière pourrait citer au moins cinq autres prêtres de la FSSPX dans cette situation. De même, la FSSPX n’a jamais cessé sa collaboration publique avec certains prêtres convaincus de la déchéance formelle du pape (pour ne parler que des défunts, citons les abbés Coache, Sockel, Schaeffer… et bien d’autres).

Tout dernièrement, le Cor Unum n° 111 de juin 2015, annonçait dans sa chronique : « Le 15 mai, à l’Œuvre de l’Étoile, le Père Raffalli fêtait son jubilé d’or, en présence de plusieurs confrères. Fondée à Nîmes il y a plus de cinquante ans, l’œuvre accueille des enfants réputés difficiles. » Or le Père Raffalli est un sédévacantiste, tout ce qu’il y a de plus sédévacantiste. Mais cela n’a nullement empêché le représentant du supérieur du District de France, l’abbé Boivin, et les abbés Radier, J. Laguérie et X. Beauvais de servir ou d’assister à sa messe non una cum. Dans son prêche, l’abbé Radier a même loué le père Raffalli comme étant un “vaillant combattant de la foi”. En réalité, la FSSPX se contrefiche du père Raffalli mais beaucoup moins de son œuvre matérielle : une belle église, de vaste bâtiments dans une région où la FSSPX n’est pas implantée… Bref si, comme l’abbé Schaeffer, vous êtes capable d’offrir à la FSSPX un immeuble au cœur de Paris ou d’offrir aux dominicaines de Fanjeaux un châteaux dans la Nièvre, vous pouvez être assurer que votre messe “non una cum” ou votre position “sédévacantiste” ne poseront plus aucun problème.

Le ton et le contenu du bulletin de Notre-Dame du Pointet manifestent un aveuglement spirituel et une mauvaise volonté évidente et inquiétante. Nous avions connu l’abbé Delagneau plus perspicace et plus vertueux. Prions le Père Calmel pour ce prieur qui devient, année après année, un contre exemple et pour qu’il ne finisse point comme les pères de Chabeuil, ces valeureux prédicateurs des exercices de Saint-Ignace et du Christ-roi qui ont tout de même fini par dire la messe Paul VI et qui invoquent aujourd’hui sans difficulté “saint” Jean-Paul II…

« Partout la peur d’être tournés en ridicule, d’être gênés dans l’action apostolique, d’être voués à l’insécurité matérielle. Partout la peur de la relégation sociologique. Trop rares sont ceux qui, à cause du Seigneur et de son nom, se moquent de l’isolement d’aujourd’hui et de l’incertitude de demain. Chez une foule de moines et de religieuses un aveuglement si tenace, une couche d’optimisme d’une telle épaisseur qu’ils ont confondu la divine illumination du Saint-Esprit avec les rayons sinistres du Soleil de Satan… En beaucoup de bonnes âmes, […] une notion fausse de l’obéissance qui, sous prétexte que l’autorité a parlé, n’hésite pas à renier les lumières primordiales levées dans notre cœur… » (Père Calmel, Itinéraire n° 148)

[1] Mgr Lefebvre, Le coup de maître de Satan, 24 fév. 1977.

[2] Conférence à Ecône du 28-01-1986. Au sujet de Jean-Paul II et d’Assise.

[3] Mgr Lefebvre, Entretien Fideliter n°66, novembre-décembre 1988, p. 12-13.

[4] Mgr Lefebvre, Itinéraire spirituel, 1990, p. 31.

[5] Communiqué contre le sacre de Mgr Faure, Menzingen, le 19 mars 2015.