La Milice française était une organisation politique sous l’Etat français créée le 30 janvier 1943 par Pierre Laval, en accord avec le maréchal Pétain pour le maintien de l’ordre en réprimant les actions frauduleuses du marché noir, et pour la lutte contre les terroristes et le communisme. Son chef opérationnel était Joseph Darnand, héros de la Première Guerre mondiale.
Le 21 novembre 1942, à la radio, Darnand explique pourquoi il est pour la réconciliation et la collaboration franco-allemande :
« C’est un soldat français qui vous parle. Combattant des deux guerres, volontaire pour me battre en 1916, volontaire pour me battre en 1939, j’ai affronté deux fois les Allemands et trois fois j’ai été blessé dans ma chair. […] jeunes Français révolutionnaires […] militants de l’État nouveau […] ne croyez surtout pas que vous ne devez être que les artisans de la révolution intérieure. Jamais vous ne ferez votre révolution si les Anglo-américains ramènent dans leurs bagages de conquérants le capitalisme et la juiverie internationale. »
Pour Darnand, « la Milice groupera des personnes de tous les âges, de tous les milieux et de toutes les professions, désireuses de prendre une part effective au redressement du pays. »
L’article 3 de ses statuts précisaient que « les membres de la Milice française doivent satisfaire aux conditions suivantes : 1° Être français de naissance. 2° Ne pas être juif. 3° N’adhérer à aucune société secrète. 4° Être volontaire. 5° Être agréé par le chef départemental. »
Les miliciens, comme l’indique le début du Chant des cohortes prononçaient, à genoux, ce serment :
« Je m’engage sur l’honneur à servir la France au sacrifice même de ma vie. Je jure de consacrer toutes mes forces à faire triompher l’idéal révolutionnaire de la Milice française, dont j’accepte librement la discipline. Je le jure ! »
La période 39-45 fut une guerre avant tout économique et idéologique. La Milice, mouvement politique révolutionnaire pour soutenir la Révolution nationale du Maréchal Pétain sut démontrer son efficacité sur le terrain de l’action et de la propagande. Ce qui ne fut pas du goût des communistes qui obéissaient aux ordres de Moscou, ni des Gaullistes aux ordres de Londres…
La Milice fut donc une cible privilégiée de la Résistance et victime d’actes terroristes.
Créée en 1942, ce n’est que sept mois plus tard, en 1943, que la Milice s’arme pour se défendre : entre temps elle avait perdu 33 de ses membres abattus comme des chiens dont deux femmes, un général de 75 ans, un curé de 72 ans et un garçon de 14 ans.
Voici quelques exemples des hauts faits de la terreur résistante : Le 25 juin 1943, à Grenoble, un jeune milicien de 17 ans, Henri Burgat, tomba sous les balles de deux individus qui étaient venus lui remettre une fausse convocation pour le STO… Norbert Borrelly, père de sept enfants, fut tué de six balles dans le ventre alors qu’il allait, comme tous les matins, acheter son journal… Mlle Claire Fillou, 19 ans, mortellement blessée d’une balle au poumon par des individus qui visaient son père et l’atteignirent… Un hôtelier de l’Ain devenu depuis peu milicien, Camille Barberet, fut criblé de balles devant son établissement par un commando composé d’une vingtaine d’hommes, etc.
Avant d’être armée, la Milice avait essuyé plus de 100 attentats à la bombe contres des permanences et des maisons particulières, 33 miliciens avaient été tués et 165 autres blessés. A partir de ce moment, la Milice commença à exercer des représailles ciblées mais sans pitié. Joseph Darnand indiqua alors que « le temps de l’indulgence est passé. La Milice française a supporté pendant cinq mois les coups des assassins, sans riposter. La terreur s’est accrue, a touché tous les milieux politiques, toutes les professions, toutes les personnalités, […] que nos adversaires sachent, et ils le savent bien, qu’aucun de leur crime ne restera impuni, que nous frapperons et les assassins et les complices. On ne compose pas avec les hors-la-loi. On ne discute pas avec les professionnels du crime […]. Pourtant — qu’on me comprenne bien — je n’ai pas l’intention d’encourager des représailles individuelles, de livrer l’exercice de la justice aux citoyens. Ces méthodes nous conduiraient au désordre et à la guerre civile. Les représailles doivent être ordonnées par une autorité supérieure. » (Je Suis Partout, 7 janvier 1944)
En effet, le Milicien Chardonneau, ivre, qui avait abattu des maquisards prisonniers, sera fusillé par un peloton de miliciens à Limoges en 1944. Les Miliciens, contrairement à certains résistants, n’ont jamais assassiné des terroristes dans leur lit d’hôpital, ni à la sortie de leur mariage…
Une impitoyable guerre civile, où un camp avait pour morale la fin justifie les moyens, poussa à la fin de la guerre, environ 2.500 miliciens et leurs familles à prendre le chemin de l’Allemagne pour survivre. 1.800 furent versés dans la division Charlemagne.
Les miliciens furent souvent les cibles privilégiées de l’Épuration sauvage pratiquée par les FFI tandis que l’Épuration légale organisée par le gouvernement provisoire condamna aussi nombre de miliciens à la peine de mort, à la prison ou aux travaux forcés.
De nombreux miliciens furent alors exécutés sommairement, parfois en groupes.
Les lettres qui vont suivre sont les seuls souvenirs du massacre de 76 prisonniers miliciens sur 97 en une seule journée au Grand-Bornand, fin août 1944, après un jugement inique et expéditif.
Au matin du samedi 19 août 1944, les miliciens savoyards incorporés dans la Franc-Garde, depuis l’ordre de mobilisation lancé par Joseph Darnand, quittent leur cantonnement par la route d’Albertville. Dans la nuit, les chefs départementaux ont rencontré les chefs de la Résistance : les Francs-Gardes se rendent avec les honneurs de la guerre, ils conservent leurs armes et seront traités en prisonniers de guerre.
Mais à Saint-Jorioz, au milieu d’un grand rassemblement de maquisards, les Francs-Gardes sont désarmés, à l’exclusion des chefs qui conservent leur pistolet. Les captifs, poussés dans des camions et sous bonne garde, sont conduits au Grand-Bornand. Là ils sont entassés sous les combles de la salle paroissiale, les officiers, toujours en possession de leurs armes, étant conduits dans une pièce au 2e étage du même bâtiment.
Après plusieurs sévices, dans la matinée du mercredi 23 août, commence la comparution des Francs-Gardes devant une cour martiale qui a fixé elle-même sa procédure et que préside un commandant F.T.P. ayant pour assesseurs deux représentants de l’A.S. et deux autres F.T.P. Le procureur et le greffier sont eux aussi des résistants.
Enchaînés, gardés par les gendarmes, les miliciens sont appelés dix par dix et brièvement interrogés. Parfois, des résistants témoignent, puis le procureur requiert une peine… La mort en général. Pour donner à cette procédure une apparence de régularité, quatre avocats d’Annecy, commis d’office, tentent d’improviser une défense. La Cour siège sans désemparer jusqu’au matin du jeudi 24 août. Après une ultime plaidoirie, l’arrêt est rendu. Soixante seize condamnations à mort, vingt et un “acquittements”.
Jeudi 24 août, fête de saint Barthélemy, à huit heures, les camions emmènent les condamnés pour le hameau du Bouchet au Lieu-dit « La Peserettaz ». Cinq par cinq les prisonniers vont vers les poteaux plantés à la lisière de la forêt. Ils refusent le bandeau et tombent sous la salve en clamant leur foi.
Ils étaient Français. La plupart d’entre eux chrétiens convaincus et paysans issus de la terre savoyarde qu’ils aimaient. Le plus âgé avait combattu à Verdun… le plus jeune venait d’avoir seize ans.
La Sapinière donnera, tous les 8 du mois, les vingt lettres de ces miliciens, pour finir avec celle de Jean Bassompierre… La photo illustrant les prochains articles sera toujours la même : celle d’un jeune milicien fusillé à Grenoble.
Ces lettres, outre le mérite d’élever nos âmes, seront un utile devoir de mémoire pour nous aider à discerner l’amour de la haine.
(à suivre)