Le 10 mai dernier vous informiez vos confrères du District de France qu’ « en accord avec Monseigneur Fellay, il m’a fallu prendre de difficiles décisions envers les confrères qui ont signé le document incriminé. Monsieur l’abbé de La Rocque est relevé de sa charge de « curé » de Saint-Nicolas du Chardonnet et les sept signataires eux-mêmes relevés de leur charge de doyen. Monseigneur Fellay a nommé Monsieur l’abbé Vassal en remplacement de Monsieur l’abbé de La Rocque. »
Que s’est-il passé ? Pourquoi Mgr Fellay est-il revenu sur son premier choix ? Qu’importe. Nous savons tous aujourd’hui que M. l’abbé Puga assure, par intérim, la fonction de « curé » de Saint-Nicolas du Chardonnet jusqu’au 15 août prochain.
M. l’abbé Puga n’est pas un inconnu. Pendant plusieurs décennies, il enseigna différentes matières au séminaire d’Écône (Exégèse, Théologie morale, Droit Canon). Presque tous les doyens signataires et non-signataires et la très grande majorité des prêtres du district de France ont été ses étudiants. Il les connaît tous et tous le connaissent. Je crois bien volontiers M. l’abbé Puga qui « assure que de nombreux confrères du District » lui ont fait part de leur gratitude pour l’initiative des Doyens.
J’ai été d’ailleurs moi-même bien placé pour savoir qu’il jouissait d’une bonne considération auprès des plus hautes autorités de la FSSPX. En effet lorsque les confrères chargés de me juger (les abbés Quilton, Petrucci et Wuilloud), refusèrent sans explication, que M. l’abbé Pivert fut mon avocat, ils me proposèrent, trois noms, au choix, dont celui de M. l’abbé Puga. Ce n’était pas pour me déplaire. M. L’abbé Puga avait déjà accepté la défense M. l’abbé Salenave. Lisez ou relisez sa plaidoirie du 1er mai 2013 dans les Actes des procès p. 89-96, c’est un petit monument d’intelligence, de finesse, de courage aussi.
Le 3 juin suivant, de Jaidhof, je l’appelais donc plein d’espérance pour lui confier ma défense. Ces tout premiers mots furent les suivants : « De tout cœur avec vous ! » Croyez-moi, ça fait du bien au moral lorsqu’on vit son 85ème jour d’exil.
Mais il refusa de répondre favorablement à ma demande, pour plusieurs motifs qui l’honorent, dont le suivant : Il estimait injuste de remplacer M. l’abbé Pivert qu’il jugeait plus compétent que lui-même pour avoir été dix ans le canoniste expérimenté du District de France. « Je ne peux pas accepter cela car c’est un délit de « sale gueule » ! me dit-il.
Comment M. L’abbé Puga jugeait-il la déclaration des sept Doyens ? Je pouvais le supposer mais aucun indice ne m’était parvenu jusqu’à dimanche dernier où l’un des fidèles m’a transmis une copie de sa lettre du 7 mai dernier.
Sa lecture ne m’a pas surpris. J’ai bien reconnu là, la liberté d’esprit de mon ancien professeur de séminaire. C’est une leçon du meilleur goût. Je ne doute pas qu’elle fortifie plus d’un confrère. Cette lettre me fait penser à l’une ou l’autre de M. l’abbé Moulin.
Peut-on imaginer, Monsieur le Supérieur de District, que vous ne connaissiez pas cette lettre ? Cela manifesterait un isolement très inquiétant.
Dans votre message du 10 mai, aux prêtres du District, vous écrivez : « Le texte diffusé présente certes des erreurs, des insuffisances, mais proposé avec loyauté avant sa publication soit au district, soit à la Maison générale, il aurait mérité d’être étudié et amendé, … »
Trois jours plus tôt, Monsieur l’abbé Puga, « en tant que prêtre du District » écrivait qu’il avait lu cette lettre « avec attention », qu’il estimait que son « argumentation vraie, précise, pleine de foi et canoniquement fort bien soutenue rassurera et apaisera » les fidèles. « J’ai particulièrement apprécié la conclusion de votre lettre… » Pas de doute, l’ancien professeur était fier du travail de ses anciens séminaristes !…
Je n’insiste pas, j’aurai trop peur d’être désobligeant et ce n’est nullement mon intention, mais permettez un dernier mot avant de prendre congé :
Vous avez prestement exécuté M. l’abbé de La Rocque pour le remplacer par M. l’abbé Puga ?
Vous avez sanctionné M. l’abbé de La Rocque pour le remplacer par un confrère qui l’a félicité, lui et les six autres Doyens, pour leur déclaration ?
Pourquoi n’avoir pas maintenu M. l’abbé de La Rocque à son poste ?
Le dernier Cor unum n° 116 de mars 2017 annonce qu’une fiche d’évaluation annuelle sera établie pour chaque membre de la FSSPX. Qu’allez-vous inscrire sur celle de M. l’abbé Puga ? Et que va-t-on inscrire sur la vôtre ?
Non, décidément, rien ne va plus.
Abbé Nicolas Pinaud
Le 22 mai 2017
La lettre de M. l’abbé Puga
À MM. les abbés David Aldalur, Xavier
Beauvais, François-Xavier Camper,
Bruno France, Thierry Gaudray,
Patrick de La Rocque, Thierry Legrand
Paris, 7 mai 2017
Bien chers confrères et doyens,
C’est avec attention que j’ai lu votre « Lettre des Doyens » rendue publique le 7 mai dernier. En tant que prêtre du district je voudrais vous remercier sincèrement pour cette déclaration si claire et si forte qui aura comme effet, j’en suis certain, de rassurer nos fidèles quant à la certitude de toujours trouver auprès des prêtres de notre chère Fraternité Saint Pie X l’assistance nécessaire pour contracter et célébrer leur mariage dans l’esprit du combat mené par Mgr Lefebvre, c’est-à-dire dans un esprit de fidélité sans faille à l’enseignement de l’Église.
La décision du Pape François, rendue publique par la Commission Ecclesia Dei au mois d’avril dernier, déjà largement commentée dans les media, a causé une grande inquiétude chez les fidèles ; ceux-ci craignant que nous leur demandions désormais de s’en remettre nécessairement et uniquement à la décision des évêques locaux pour pouvoir échanger validement et licitement un consentement matrimonial selon le rite traditionnel.
L’argumentation vraie, précise, pleine de foi et canoniquement fort bien soutenue de votre lettre les rassurera et les apaisera. Déjà, j’en ai reçu des témoignages. C’est en vrais pasteurs soucieux du bien et de la protection des âmes que Dieu vous a confiées, que vous avez agi. Dans la situation actuelle le fait de parler haut, fort et sans détour était devenu plus que jamais nécessaire ; vous l’avez fait, soyez en encore vivement remerciés.
J’ai particulièrement apprécié la conclusion de votre lettre où vous soulignez que le premier pas vers l’octroi d’une éventuelle prélature personnelle censée nous garder tels que nous sommes, consiste paradoxalement dans une volonté de soumettre les mariages de nos fidèles à des ordinaires qui n’ont rien à objecter aux enseignements délétères et aux décisions désastreuses du Pape François sur la sainteté du mariage.
Je puis vous assurer que de nombreux confrères du district, avec qui j’ai eu déjà l’occasion de m’entretenir, partagent en la matière ce sentiment de gratitude. Comme me le disait l’un d’entre eux : « c’est un beau texte, clair et réconfortant par cette vigueur que nous pensions ne plus jamais devoir entendre. »
Que le Cœur Immaculé de Marie, auquel Mgr Lefebvre a consacré la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, soit notre secours. Que Notre Seigneur vous garde et vous protège.
Abbé Denis PUGA