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LA DECLARATION DOCTRINALE DE MGR FELLAY DU 15 AVRIL 2012 : L’EVIDENCE D’UNE TRAHISON – II

par | Juin 27, 2013 | Cor Unum N° 104 Mars 2013, Déclaration doctrinale, Documents officiels, Foi, Mgr Fellay

TELECHARGER LE TEXTE COMPLET (52 pages): PARTIE I & II

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DEUXIEME PARTIE : LA DÉCLARATION DOCTRINALE DU 15 AVRIL 2012

 

I. LES CIRCONSTANCES QUI ENTOURÈRENT LA DÉCLARATION

 

Avant de passer à l’analyse de la Déclaration Doctrinale (DD) présentée par Mgr Fellay au Card. Levada le 15 avril 2012, rappelons les événements qui précédèrent immédiatement sa rédaction:

          Le 16 mars 2012, le Cardinal Levada répondit par une lettre à Mgr Fellay refusant le Préambule Doctrinale (PD2) de Mgr Fellay ;

          Le 15 avril 2012 Mgr Fellay présenta sa Déclaration Doctrinale (DD) ;

          Le 13 juin 2012, la Déclaration Doctrinale (DD) fut rejetée et Rome, qui présenta un nouveau Préambule Doctrinal (PD3).

 

1. La lettre du Cardinal Levada du 16 mars 2012.

Dans cette lettre, le Cardinal Levada exprime à Mgr Fellay sa « tristesse » d’apprendre «  [son] « refus d’accepter le texte de ce Préambule [du 14 septembre 2011] qui [lui] avait été présenté ».

Le cardinal commence par rejeter ce qu’il appelle les « solutions alternatives » proposées par la Fraternité, c’est-à-dire, le Préambule Doctrinal (PD2) composé entièrement par la Fraternité le 30 novembre 2011.

Ensuite, il affirme que ces solutions « ne suffisent pas à résoudre les problèmes doctrinaux qui sont à la base de la fracture entre le Saint-Siège et la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, parce qu’elles ne concernent pas directement les points controversés relatifs à certains enseignements doctrinaux du Concile Vatican II et du Magistère pontifical qui a suivi ».

Il cite Benoît XVI, lors de la levée des « excommunications » en 2009, qui reprochait à la Fraternité de « geler l’autorité magistérielle » à la période d’avant Vatican II, lequel d’ailleurs « renferme l’entière histoire doctrinale de l’Eglise » (sic).

Surtout il fait référence au paragraphe III du Préambule doctrinal sur « l’unité du Magistère » qui, selon  lui, exclut toute opposition entre le magistère actuel et le précédent, car penser autrement « signifie objectivement placer son jugement propre au-dessus du Magistère lui- même ».

Ensuite le Cardinal devient menaçant :

« Refuser le Préambule doctrinal, expressément approuvé par le Saint-Père, c’est, de facto, refuser aussi la fidélité au Pontife romain et au Magistère actuel de l’Église (cf. nn. I et II du Préambule doctrinal) cela entraîne la rupture de la communion avec le Pontife Romain et les conséquences canoniques qui s’ensuivent, selon ce que disposent les canons 751 et 1364 du Code de Droit canonique ».

En d’autres termes, le cardinal menace de déclarer la Fraternité « schismatique » et d’utiliser à nouveau l’excommunication  si Mgr Fellay ne revient pas au Préambule présenté par Rome.

Finalement il invite Mgr Fellay « à réfléchir aux graves conséquences de [sa] prise de position, au cas où elle serait définitivement confirmée », à « reconsidérer » son refus du Préambule doctrinal, et lui donne un délai d’un mois pour apporter sa réponse définitive.

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A vrai dire, le Cardinal Levada a raison de demander à Mgr Fellay de se prononcer sur les « les points controversés » qui sont la cause de la « fracture » entre la Fraternité et Rome au sujet du concile et du « magistère » post-conciliaire.

En effet, ces problèmes n’ont pas été mentionnés dans le PD2 de Mgr Fellay.

 

2. Réactions de Mgr Fellay à la lettre du Cardinal Levada.

A partir de ce moment Mgr Fellay est partagé entre le refus d’aller plus loin, et le désir d’être reconnu par Rome.

 

a. Un optimisme sans fondement : Rome a changé !

Mgr Fellay montre un optimisme béat qui apparaît dans son Editorial de Cor Unum 101 (Mars 2012), qui mérite d’être revu en détail.

Il commence par faire une rétrospective des événements des dernières années, qui découragent de faire confiance à Rome.

Sur les discussions doctrinales de 2009-2011 il est plutôt déçu :

« L’absence d’évaluation de la part de Rome sur les discussions doctrinales » (…) « Les discussions se sont terminées, il est vrai, un peu abruptement »

Et sur le contenu des discussions il reconnait que l’accord doctrinal avec Rome est impossible :

« Nos experts ont bien montré l’opposition qu’il y a entre, d’une part, l’enseignement de l’Eglise d’avant le Concile et d’autre part celui du Concile Vatican II et de ses suites. »

 

Il mentionne ensuite les nouvelles propositions de Rome (15 septembre 2011) et les réponses de la Fraternité :

« Nous avons donc reçu une proposition [Préambule doctrinal] qui tentait de nous faire entrer dans le système de l’herméneutique de la continuité. (…) Une première fois le 1er décembre, une deuxième fois le 12 janvier, nous avons communiqué à Rome l’impossibilité dans laquelle nous nous trouvons de signer un texte qui contient de telles ambiguïtés ».

Et cependant Mgr Fellay continue à ne pas comprendre (?) ce que Rome veut en pratique :

« La proposition faite par cette même Congrégation : reconnaître la Fraternité en lui accordant un statut juridique de prélature personnelle à la condition de signer un texte ambigu, dont nous avons parlé lors du dernier Cor unum [No. 100]. Cela est surprenant, dans la mesure où les discussions ont manifesté un désaccord profond sur presque tous les points abordés

« Cela est surprenant » : Mgr Fellay a du mal à voir que si Rome a accepté que la Fraternité expose ses positions lors des discussions, mais pas plus, c’est parce qu’elle attendait simplement la nouvelle phase, de nouvelles négociations avec un Préambule doctrinal à signer en vue du statut juridique.

 

Ensuite il propose un faux raisonnement (un sophisme) dans lequel il dévoile sa nouvelle stratégie par rapport à Rome.

Après avoir rassuré tout le monde en affirmant que « la foi [est] d’abord et avant tout », il affirme que « la situation de l’Eglise peut nous obliger à poser des actes de prudence relatifs et correspondants à la situation concrète ». En d’autres mots, si la situation « concrète » change à Rome, il faut aussi changer notre attitude vis-vis de Rome.

Il mentionne ce que le Chapitre de 2006 avait dit à propos des futures négociations avec Rome :

« Le Chapitre de 2006 a émis une ligne de conduite bien claire en ce qui concerne notre situation par rapport à Rome. Nous donnons le primat à la foi, sans chercher de notre côté une solution pratique avant la résolution de la question doctrinale. »

Ce qui choque ici c’est qu’il appelle la condition sine qua non du Chapitre une simple « ligne de conduite », donc modifiable selon les circonstances, ce qu’il va d’ailleurs faire : il va chercher « une solution pratique avant la résolution de la question doctrinale. » 

 

Pour essayer de convaincre qu’il faut changer notre approche vis-à-vis de Rome, il tente de montrer que la situation « concrète » a changé pour le bien à Rome en faisant « un constat historique sur la situation présente de l’Eglise ».

Il fait donc un parallèle entre 2006 (à cause du Chapitre) et 2012 pour tenter de démontrer qu’il y a eu un changement à Rome qui nécessite aussi le nôtre.

Il donne comme « preuve » de ce changement des « faits » qui ne sont pas très convaincants, car lui-même utilise des expressions comme « quoique peu visible », « même timides », « contrecarrée » « mise sous le boisseau », « même si leur application laisse encore à désirer » etc.

Il parle d’un « un double mouvement opposé et inégal », qui n’est qu’une lutte entre des conservateurs et des extrémistes, mais notons bien que ces conservateurs et ces extrémistes sont tous conciliaires !

Il est sensible aux flatteries de ses « nouveaux amis à Rome », et il dit : « De jeunes évêques nous manifestent clairement leur sympathie… C’est peut-être à Rome que ces choses sont le plus manifestes ! Nous avons maintenant des contacts amicaux dans les dicastères les plus importants, également dans l’entourage du Pape ! »

A l’entendre, cette description laisse penser que l’église conciliaire est en train de mourir, de se désintégrer… ! II affirme même que ce «  mouvement [restaurateur] ne peut pas être arrêté ».

Et, comble de l’illusion, il va jusqu’à affirmer ceci : « la divine Providence s’exprime à travers la réalité des faits » (sic), c’est-à-dire qu’il juge que la Providence s’exprime à travers les peu réjouissants, très mitigés et pas du tout convaincants qu’il vient d’énumérer. Il fait, comme d’habitude, du « surnaturalisme » afin de faire passer ses propres décisions !

Et ainsi il arrive à sa conclusion :

« Si cela est vrai, et j’en suis persuadé, cela réclame de nous un nouveau positionnement par rapport à l’Église officielle. C’est dans ce contexte qu’il convient de se poser la question d’une reconnaissance de la Fraternité par l’Église officielle… Nos nouveaux amis à Rome affirment que l’impact d’une telle reconnaissance serait extrêmement puissant sur toute l’Église, comme une confirmation de l’importance de la Tradition pour l’Église. »

Ensuite, pour calmer dans ses rangs les opposants aux accords, il se veut rassurant :

« Cependant, une telle réalisation concrète requiert deux points absolument nécessaires pour assurer notre survie : Le premier est qu’il ne soit pas demandé à la Fraternité des concessions qui touchent la foi et ce qui en découle (liturgie, sacrements, morale, discipline). Le deuxième, qu’une réelle liberté et autonomie d’action soit concédée à la Fraternité, et qu’elle lui permette de vivre et de se développer concrètement. Ce sont les circonstances concrètes qui montreront quand le temps sera venu de ‘faire le pas’  vers l’Église officielle. Aujourd’hui, malgré l’approche romaine du 14 septembre et à cause des conditions apposées, cela semble encore impossible ».

Mais on voit qu’il est plutôt optimiste:

« Quand le Bon Dieu voudra, ce temps viendra. Nous ne pouvons pas non plus exclure, parce que le Pape semble mettre tout son poids dans cette affaire, qu’elle connaisse un dénouement subit. » (Cor unum 101, mars 2012)

Remarquons que lorsque Mgr Fellay parle d’avoir « un nouveau positionnement par rapport à l’Église officielle », qu’est que cela veut dire sinon qu’il est prêt à changer la position de la Fraternité ?

Il se contente de poser seulement deux conditions pour assurer notre « survie », pas plus : (1) pas de concessions doctrinales de notre part, et (2) la liberté pour vivre et se développer. On se demande, où est passée la critique des erreurs conciliaires ?

Nous verrons plus loin que même ces deux conditions ne pouvaient pas s’accomplir, car Mgr Fellay dans sa Déclaration commencera par faire des concessions doctrinales majeures, et la liberté d’action dont il rêvait aurait été gravement compromise par son acceptation du nouveau Code.

Ensuite, il répète que les conditions favorables sont données pour répondre favorablement à Rome :

« … s’il y avait un changement dans la situation de l’Église par rapport à la Tradition, cela pourrait nécessiter une modification correspondante de la conclusion [recherche d’un accord] sans que pour autant nos principes aient changé en quoi que ce soit ! … Or, il ne fait aucun doute que depuis 2006, nous assistons à un développement dans l’Église, développement important et fort intéressant, quoique peu visible ».

La phrase « s’il y  avait un changement », est ambigüe… car elle pourrait signifier que ce changement est encore à attendre, ou qu’il est déjà arrivé.

Mais après avoir vu l’énumération par Mgr Fellay des changements positifs intervenus on ne peut pas s’empêcher de conclure que, pour lui, le « changement » attendu à Rome est déjà arrivé !

Quel est ce « changement » ? Pour Mgr Fellay il s’agit seulement d’un changement d’attitude de Rome envers nous, et non pas un changement de Rome elle-même !

Certes, la Rome actuelle peut avoir un changement « d’attitude » envers la Fraternité, mais ce changement est visiblement politique et diplomatique, et non doctrinal, et il a toujours pour but de nous amener à accepter les réformes conciliaires

 Mgr Fellay ne peut pas faire mention de changement doctrinal de la part de Rome, car personne ne le croirait !  C’est ici que réside la différence fondamentale entre Mgr Fellay et le Chapitre de 2006 sur le changement à attendre de la part de Rome avant de travailler à un accord pratique.

Il est donc clair que pour Mgr Fellay le changement doctrinal de Rome doit être laissé de côté, et qu’il ne sera résolu que plus tard, après l’accord pratique

 

b. Le dilemme pour faire le bon choix.

Mgr Fellay se trouve maintenant devant le dilemme d’avoir à choisir entre, d’un côté le refus de revenir sur le Préambule de Rome, qu’il avait rejeté, et de l’autre côté l’option de continuer les négociations, et de présenter un nouveau document doctrinal, mais le Cardinal Levada, lui, exige de revenir à la substance des idées contenues dans le Préambule romain du 14 septembre 2011.

Rompre les négociations à ce point demande ni plus ni moins de la part de Mgr Fellay un acte héroïque, peut-être difficile à faire, mais encore possible. (*)

 (*) On se souvient qu’à ce moment crucial Mgr Fellay demanda que l’on prie spécialement dans nos maisons pour écarter « un grave danger » pour la Fraternité.

On peut penser que si Mgr Fellay a demandé que l’on prie pour écarter un « grave danger », c’est parce qu’il s’apprêtait plutôt à refuser le Préambule doctrinal de Rome, et en conséquence qu’il jugeait que nous nous exposions à de possibles sanctions. C’est du moins l’impression que l’on avait à ce moment et qui apparait plus clairement aujourd’hui.

Que va donc faire Mgr Fellay ?

          S’il confirme son refus du Préambule doctrinal de Rome, il pourrait être confronté à de possibles « sanctions » de la Rome moderniste, comme le Cardinal Levada l’en a menacé ;

          S’il « revoit sa copie », en présentant un nouveau document suffisamment ambigu, qui puisse plaire à la fois à Rome et aux siens, la reconnaissance canonique ne serait ainsi qu’à un pas.

Mais une chose est sûre : la décision ultime de Mgr Fellay dépendra de ses motivations le plus profondes.

 

(a) L’option du rejet.

S’il choisit la première option, celle du rejet du Préambule présenté par Rome, c’est parce qu’il considère qu’il n’y a pas de concession doctrinale possible.

Après tout, en agissant ainsi il ne ferait que confirmer les critiques graves qu’il a émises à l’encontre de ce Préambule, dans la deuxième lettre du 12 janvier 2012, où il a exposé, point par point, les graves problèmes doctrinaux de ce document. Agir autrement, ce serait se contredire lui-même ! Ainsi, il ne ferait pas de compromis doctrinal et il sauverait l’unité de la Fraternité et celle de la Tradition.

Certes, ce refus nous exposerait à de nouvelles « excommunications » et à être déclarés « schismatiques »… Mais Mgr Fellay ne devrait pas craindre de nouvelles « condamnations » par la Rome moderniste, puisqu’elles ne seraient qu’apparentes, car invalides.

Voici ce que pensait Mgr Lefebvre des « sanctions » venant de la Rome moderniste dans sa Conférence de presse à la veille des sacres, en 1988 :

« L’Osservatore Romano publiera l’excommunication, une déclaration de schisme, évidemment.

Qu’est-ce que tout cela veut dire ?

Excommunication par qui ? Par une Rome moderniste par une Rome qui n’a plus parfaitement la foi catholique. (…)

Alors nous sommes excommuniés par des modernistes, par des gens qui ont été condamnés par les papes précédents. Alors qu’est-ce que cela peut bien faire. Nous sommes condamnés par des gens qui sont condamnés, et qui devraient être condamnés publiquement. Cela nous laisse indifférent. Cela n’a pas de valeur évidemment. Déclaration de schisme ; schisme avec quoi, avec le Pape successeur de Pierre ? Non, schisme avec le Pape moderniste, oui, schisme avec les idées que le Pape répand partout, les idées de la Révolution, les idées modernes, oui. Nous sommes en schisme avec cela. » (15 juin 1988)

En 2012 Rome continue d’être occupée, et en pire, par des modernistes et des libéraux, comme en 1988, à moins que Mgr Fellay veuille nous « faire croire l’incroyable », à savoir que la situation a changé pour le bon… ! Nous verrons plus loin que si Rome n’a pas changé, Mgr Fellay, lui, a changé !

Car l’enjeu est vraiment là : la « carotte » que Rome promet avec ces négociations est à la fin l’accord pratique, mais le « bâton » est maintenant la menace de nouvelles sanctions si on n’accepte pas leur Préambule doctrinal.

Ainsi donc, si Mgr Fellay maintenait la position doctrinale de toujours, c’est-à-dire la position de Mgr Lefebvre qui était encore à peu près la sienne propre, (au moins dans les conclusions) en janvier 2012, la Fraternité serait assurée de continuer à défendre la Tradition et à combattre les erreurs conciliaires avec une liberté réelle.

 

(b) L’option de continuer.

Si Mgr Fellay rentre dans le processus de reconnaissance canonique, il accepte par le fait même de se mettre en situation de demandeur : il aura une faveur à obtenir de Rome. Il sera donc en position d’infériorité par rapport à ses interlocuteurs, et en conséquence il devra, tôt ou tard, suivre les exigences de la Rome moderniste, et non les siennes! (*)

(*) Si nous comparons la situation de Mgr Fellay en 2012 avec la situation de Mgr Lefebvre en 1988, Mgr Lefebvre était en position de supériorité dans ses négociations avec Rome, car ce fut sa menace de consacrer un évêque qui fit bouger le pape et le Cardinal Ratzinger.

 

Cette deuxième option qui se présente à Mgr Fellay, c’est-à-dire continuer, implique que le supérieur général va devoir nécessairement présenter un nouveau document doctrinal à Rome.

En effet, s’il veut obtenir à tout prix la régularisation canonique tant désirée, il devra procéder comme le Cardinal Levada le lui a demandé, c’est-à-dire  accepter d’abord en substance les principes du Préambule de Rome du 14 septembre 2011, préambule qu’il a déjà rejeté !

Comme il a officiellement déclaré que ce document de 2011 était inacceptable, il ne peut plus à présent le reprendre franchement et ouvertement.

La seule solution pour plaire à Rome est donc de réécrire la même chose, mais d’une façon plus maquillée et ambiguë, afin que tout le monde soit content : Rome et les membres la Fraternité. En d’autres termes, il faut donc réécrire une nouvelle déclaration doctrinale qui reformule de façon apparemment plus traditionnelle les mauvais principes du préambule du 14 septembre 2011.

Mgr Fellay ne savait-il pas que la Rome moderniste demanderait des concessions doctrinales de notre part, si l’on voulait une reconnaissance canonique ? Il est difficile de croire que Mgr Fellay ne l’avait pas prévu

D’autant plus qu’il n’avait pas eu d’accord doctrinal à la fin des colloques théologiques avec Rome. Pour Rome ces colloques n’avaient d’autre but que « de clarifier les positions respectives et leurs motivations » (Cf. Note Préliminaire), pas plus.

Rome attendait simplement la fin des colloques pour introduire les demandes doctrinales. Tôt ou tard, il  était inévitable que les autorités romaines demandent des concessions doctrinales à la Fraternité. (*)

(*) Remarquons qu’il a été toujours facile à Rome d’accorder la reconnaissance canonique, (qui ne leur coûte pas grand-chose…) pourvu que La Fraternité accepte le concile et des réformes, qui ne sont pas négociables.

Mais est-ce que pour Mgr Fellay aussi il y a des points doctrinaux qui sont non-négociables ? Qu’est-ce qui est le plus important pour lui : la reconnaissance canonique ou la fidélité à la doctrine ?

 

c. La décision est prise : on continue !

La décision finalement prise par Mgr Fellay nous la connaissons :

– il met de côté son Préambule doctrinal du 30 novembre 2011 (PD2) ;

– et il présente à Rome sa Déclaration doctrinale (DD) du 15 avril 2012, qui n’était qu’une « réédition » légèrement modifiée du Préambule de Rome du 14 septembre 2011 ! (*) Mgr Fellay y fait de graves concessions engageant la foi catholique. Nous verrons que ce texte, d’abord accepté par Rome, laquelle s’apprêtait à signer l’accord avec Mgr Fellay le 13 juin 2012, sera finalement rejeté in extremis, ce jour-là. (Nous analyserons cela plus loin.)

On se souvient que la première réaction publique de Rome après l’arrivée de la Déclaration de Mgr Fellay fut plutôt favorable. Le Père Lombardi, le chef de l’Office de presse, avait commenté le 18 avril sur Radio Vatican :

« Cette réponse, selon le témoignage de ceux qui ont pu la voir, est très différente de la précédente (…) On peut dire qu’on a fait des pas en avant, c’est-à-dire que la nouvelle réponse est plutôt encourageante ».

Remarquons que le Père Lombardi certainement a vu la Déclaration, que son témoignage a un caractère officiel, et par trois fois il a un avis positif sur elle.

 

Ainsi donc deux aspects motivèrent officiellement la décision de Mgr Fellay de répondre favorablement à Rome en présentant sa Déclaration doctrinale du 15 avril 2012 :

 

          Un aspect « positif » : Mgr Fellay affirme (à tort) qu’il y a « un changement dans la situation de l’Église par rapport à la Tradition » ;c’est le premier argument qu’il utilise pour justifier la demande d’une reconnaissance canonique à Rome et la poursuite des discussions à cet effet. Si Rome a « changé », nous devons aussi  changer! La Fraternité va devoir mettre en pratique le « nouveau positionnement par rapport à l’Église officielle » 

 

          Un aspect « négatif » : la peur de possibles sanctions de Rome. Il y a ici manipulation. Mgr Fellay dramatise vis-à-vis de nous la situation et insiste sur le danger des sanctions pour justifier son choix. (Nous y reviendrons.)

 

Il est permis de se demander si ces raisons officielles avancées par Menzingen sont vraiment sincères. L’amélioration de la situation à Rome est clairement inexistante. Quant à la peur des sanctions, depuis 1988, elle n’a plus aucune prise sur nous. Pour quelle raison la fameuse lettre de 1988 de tous les supérieurs de la Fraternité Saint Pie X réclamant pour eux aussi l’excommunication comme un honneur serait-elle considérée comme « caduque » ? Devrions-nous avoir « peur » des sanctions que nous réclamions avant ?

Ces deux raisons avancées par Menzingen sonnent faux.

 

Une chose est sûre : Mgr Fellay veut à tout prix faire un accord pratique avec Rome et il essaye de le justifier comme il le peut, maladroitement. Pour lui, malgré ses dénégations, il est clair que l’accord pratique passe dorénavant avant la défense de la foi. Ce qui explique pourquoi il va faire dans sa déclaration doctrinale du 15 avril 2012 des concessions doctrinales graves.

 

La Fraternité payera cher les conséquences de la décision de Mgr Fellay de présenter sa Déclaration doctrinale.

 

 

II. LA DÉCLARATION DOCTRINALE (DD) DE MGR FELLAY DU 15 AVRIL 2012.

 

A. ANALYSE DE LA DÉCLARATION EN GÉNÉRAL.

Moins d’un mois après la lettre menaçante du Cardinal Levada, le 15 avril 2012, Mgr Fellay présente à Rome sa Déclaration doctrinale (DD). (*)

(*) Il faut noter que cette Déclaration n’est accompagnée d’aucune explication annexe. Il faut supposer que c’est parce qu’elle apparaît comme suffisamment « claire » pour son auteur et ne demande aucune précision… Elle est datée du 15 avril, mais fut remise à Rome le 17.

Il ne s’agit plus, comme le Préambule Doctrinal du 30 novembre 2011 (PD2), d’un document entièrement conçu par Mgr Fellay et remplaçant le Préambule de Rome.

Mgr Fellay, face au refus de Rome de son PD2, s’est contenté de reprendre le Préambule Doctrinal (PD1) de Rome du 14 septembre 2011, en le modifiant quelque peu.

Mgr Fellay reste néanmoins le vrai auteur de la Déclaration doctrinale du 15 avril 2012, même s’il s’est inspiré largement du mauvais texte romain de 2011 pour sa rédaction.

Il commença par lui donner un autre nom : « Déclaration Doctrinale ». Mais il ne faut pas s’y tromper, il s’agit d’environ 95% du texte du PD1 du Cardinal Levada du 14 septembre 2011 ! (*)

(*) Le choix du titre « Déclaration Doctrinale », dit Mgr Fellay dans sa Note introduisant ce document dans Cor Unum 104, est « emprunté à Mgr Lefebvre, en 1988, car nous ne voulions pas reprendre celui de « préambule doctrinal » dont nous avions rejeté le contenu dans notre réponse du 12 janvier ». Franchement, ces deux déclarations n’ont que très peu de choses en commun… car leur contenu est totalement différent ! (Cf. réponses aux objections)

Par ailleurs, il faut noter que, contrairement aux explications récentes de Mgr Fellay voulant minimiser la portée de sa Déclaration, le choix du titre « Déclaration » donne plus d’importance et un caractère plus définitif au document, à la différence du terme « Préambule », qui suppose l’introduction à un ou des futurs textes qui viendront après.

 

1. LA NOTE DE MGR FELLAY DANS COR UNUM N° 104.

La revue Cor Unum n°104 (Mars 2013), publie une note d’introduction de Mgr Fellay dans laquelle il tente d’expliquer aux membres de la Fraternité le « contexte » qui entoura la rédaction de sa Déclaration Doctrinale du 15 avril 2012.

Il commence par rappeler le refus par le Cardinal Levada (dans sa lettre du 16 mars 2012) du Préambule doctrinal (PD2) présenté par la Fraternité le 30 novembre 2011, en remplacement du Préambule doctrinal (PD1) présenté par Rome le 14 septembre 2011.

Il précise que pour le Cardinal Levada le rejet par la Fraternité du Préambule doctrinal, approuvé par Benoît XVI, « équivaut à une rupture de la communion avec le Pontife romain, ce qui entraîne les sanctions canoniques encourues pour schisme ».

Pourquoi Mgr Fellay ne réfute-t-il pas cet argument fallacieux du Cardinal Levada ? Se sent-il « coupable » de rejeter ce Préambule ?

Il est pourtant facile de répondre à cet argument du Cardinal. Si la Fraternité a rejeté le Préambule de Rome, c’est pour des raisons doctrinales graves. Mgr Fellay ne peut pas se dédire et l’accepter maintenant sous peine de se contredire et de pécher gravement, peu importe les menaces de Rome ! Etre « en communion » avec Benoît XVI à travers de ce Préambule, équivaut à ne pas être en communion avec tous les Papes d’avant Vatican II ni avec l’Eglise catholique. 

Ensuite, Mgr Fellay veut apparaitre « ferme » lorsqu’il affirme que c’est « le principe de la foi » qui guide ses relations avec Rome. Il ajoute que « mettre en balance ce principe pour obtenir … une reconnaissance canonique, a toujours été exclu » et qu’un « accord pratique n’aurait jamais lieu si les conditions sine qua non émises par nous plusieurs fois, tant dans différentes prises de position que dans la deuxième réponse à la Congrégation de la foi (12 janvier 2011) » n’avaient pas été remplies.

C’est beau d’affirmer cela aujourd’hui… mais pour croire ce que Mgr Fellay dit ici, il faut le juger par ses actes, et non pas par ses paroles. Les conditions sine qua non ont été peut-être énoncées à plusieurs reprises, mais la Déclaration doctrinale de Mgr Fellay, nous le verrons, ignorera ces conditions.

Et que fait-il de la condition sine qua non énoncée par le Chapitre général de 2006 qui demandait d’éviter « un impossible accord purement pratique. » Le chapitre de 2006 affirmait aussi : « Le jour où la Tradition retrouvera tous ses droits, “ le problème de la réconciliation n’aura plus de raison d’être et l’Église retrouvera une nouvelle jeunesse ” (Mgr Lefebvre)» ? Nous avons vu que Mgr Fellay écarte cette condition d’un trait en l’appelant « impraticable ».

Selon lui, le Cardinal Levada accusait la Fraternité de rejeter « tous les actes du Magistère depuis 1962 », accusation que Mgr Fellay considère « fausse ». (*)

(*) A vrai dire, il est difficile de trouver un seul document du « magistère » conciliaire ou post-conciliaire qui soit totalement orthodoxe et au sujet duquel on ne puisse pas faire de réserves… Peut-être Humanae vitae, et c’est tout ! On aimerait savoir ce que pense Mgr Fellay du sujet.

Plus loin, il parle de sa « ligne de crête » par laquelle, dit-il, il veut éviter les positions extrêmes du ralliement et du sédévacantisme, car on ne veut pas être « ni hérétiques, ni schismatiques ».

Ensuite il veut minimiser la portée de sa Déclaration en affirmant que « même si le document d’avril [2012] avait été agréé [par Rome], cela n’aurait pas suffi pour la conclusion d’une normalisation canonique », que la Déclaration « n’était pas exhaustive de notre pensée sur le Concile et le magistère actuel » et que par elle il ne voulait que compléter les entretiens doctrinaux sur un point, « l’accusation de schisme ».

On a déjà vu ce que Mgr Lefebvre pensait des accusations de « schisme » portées contre nous par la Rome moderniste, mais on dirait que Mgr Fellay est vraiment affecté par cette fausse accusation, car il semble la prend au sérieux… Ce qui n’est qu’ « apparent », le prend-t-il pour étant vrai ?

Plus loin il explique que ses « exemples de soumission à l’autorité magistérielle en soi » n’excluent pas son « opposition à bien des actes posés par elle actuellement ».

Nous verrons plus loin dans l’analyse de la Déclaration que cette explication irréaliste de Mgr Fellay ne tient pas.

Il se met sur la défensive lorsqu’il affirme que « notre pensée n’a pas été comprise en ce sens par plusieurs membres éminents de la Fraternité, qui y ont vu une ambiguïté, voire un ralliement à la thèse de l’herméneutique de la continuité ».

Si on prend ces mots à la lettre, il faudrait croire que ces « membres éminents » sont ignorants en matière théologique… Le fait est que jamais auparavant on a vu autant de prêtres et fidèles de la Tradition si gravement opposés au Supérieur général de la Fraternité à cause de ses agissements. N’est-ce pas le signe que derrière leur réaction il a plus qu’une simple incompréhension, mais un réel problème ?

 Le supérieur de la Fraternité essaie de convaincre les prêtres en disant que le rejet par Rome de cette Déclaration est la preuve que celle-ci n’était pas « un ralliement à l’herméneutique de la continuité ». Il « oublie » de mentionner que cette Déclaration a été tout d’abord approuvée par Rome, d’avril 2012 à début juin 2012, et que celle-ci s’apprêtait à la signer le 13 juin quand les événements de dernière minute ont fait changer d’avis le pape.

Mgr Fellay essaie ensuite de détourner l’attention en parlant des déplacements, modifications et ajouts dans la nouvelle Déclaration de Rome du 13 juin 2012, alors que ce qui est important est d’analyser son propre document, celui du 15 avril 2012, afin de voir s’il correspond ou non à la position constante de la Fraternité.

(Nous répondrons à la fausseté de cette affirmation à la fin de cette 2e partie)

Mgr Fellay conclut en révélant en « exclusivité » qu’il informa Mgr Di Noia, le 28 août 2012, qu’il « retirait » sa proposition du mois d’avril 2012, « qui ne peut désormais servir, dit-il, de base de travail ».

A quoi bon dire cela maintenant, alors que la Déclaration a été rejetée par Rome ?

Et indépendamment du fait qu’elle a été rejetée puis retirée comme base de travail, Mgr Fellay doit répondre pour son contenu. Il doit expliquer comment il a pu présenter un tel document comme étant la position doctrinale de la Fraternité !

Il conclut en disant qu’il ne reste comme position de la Fraternité que ces documents :

les deux lettres du 30 novembre 2011 et du 12 janvier 2012,

la Déclaration du Chapitre général du 14 juillet 2012,

– les six conditions établies par le Chapitre avant toute reconnaissance canonique.

(Nous analyserons plus loin cette affirmation de Mgr Fellay)

 

2. L’AMBIGÜITE DE LA DÉCLARATION DOCTRINALE.

Concernant la décision prise par Mgr Fellay de présenter sa Déclaration doctrinale on a le droit de se poser deux questions :

a) Pourquoi Mgr Fellay a-t-il abandonné le Préambule doctrinal (PD2) du 30 novembre 2011, un peu bancal, mais correct dans ses conclusions, et l’a-t-il remplacé par cette Déclaration Doctrinale (DD) du 15 avril, bien pire et pleine d’ambiguïtés ?

b) Le préambule du Cardinal Levada était-il modifiable au point de le rendre acceptable dans la Déclaration Doctrinale de Mgr Fellay du 15 avril 2012 ?

De la réponse à ces deux questions et de l’analyse détaillée de la Déclaration doctrinale sortira l’évidence d’une trahison grave de nos positions doctrinales et l’évidence de notre devoir de condamner les erreurs modernes.

 

a. Pour répondre à la première question, on peut constater que l’abandon par Mgr Fellay de son Préambule (PD2), celui du 30 novembre 2011, montre une concession grave face aux ennemis de la Tradition.

Le PD2, bien qu’il comporte deux omissions et une référence inacceptable à Lumen Gentium, était cependant basé essentiellement sur des documents traditionnels. Mgr Fellay avait voulu prendre l’initiative, changer de stratégie, et passer d’« accusé » en « accusateur » des innovateurs.

Mais maintenant Mgr Fellay change complètement sa position : il préfère suivre une autre voie, la voie du compromis, des concessions.

Il revient tout simplement au Préambule de Rome de septembre 2011.

Voici comment Mgr Fellay expliquait sa stratégie pleine d’ambigüité et d’équivoque, plus digne d’un mauvais politicien que d’un homme d’Eglise, lorsqu’il parle de sa Déclaration Doctrinale :

« À propos de la réponse que j’ai envoyée le 17 avril à Rome [la Déclaration doctrinale] (…) il y a (dans ce document) des déclarations qui sont tellement sur la ligne de crête que si vous êtes mal tourné ou selon que vous mettez des lunettes noires ou roses, vous les voyez comme ceci ou cela. (…) Mais que, si on veut la lire de travers, on arrivera à la comprendre de travers ». (Brignoles, 4 mai 2012 – Nouvelles de Chrétienté n° 135)

Nous sommes bien loin du langage clair de Notre Seigneur, du Catholicisme et de notre Fondateur !

En d’autres mots, si Mgr Fellay affirme que sa Déclaration peut être comprise « de travers », avec des « lunettes noires », c’est parce que son document est ambigu.

Et il confirme cette ambiguïté en affirmant : « si on veut la lire de travers, on arrivera à la comprendre de travers »

L’Ecriture ne dit-elle pas: « que votre oui soit oui, et que votre non soit non, tout le reste vient du Mauvais ». (Mt. 5 :37) et aussi « Os bilingue detestor – Je déteste la langue fourchue » (Prov. 8 :13) ? Dieu hait la langue double, ambiguë, à double sens.

Car l’ambigüité est précisément cela : c’est une expression qui a deux interprétations, une bonne et une mauvaise. Un texte ambigu est donc inacceptable, car on n’a pas le droit de favoriser l’erreur en permettant une double interprétation.

Cette ambigüité est d’autant plus condamnable lorsqu’il s’agit de la doctrine catholique, qui est toujours « intransigeante ». Comment peut-on vouloir l’ambigüité lorsqu’il s’agit des matières qui touchent à la Foi et au salut des âmes ? A cause des graves conséquences, on ne peut pas se permettre de proposer un texte à double sens.

C’est pourquoi l’Eglise condamne non seulement les expressions ouvertement erronées, comme les hérésies, mais aussi les expressions ambiguës, comme ce fut par exemple le cas lors de la condamnation de certains décrets du Synode de Pistoie.

Peut-on imaginer les documents du Magistère traditionnel remplis d’une telle ambigüité ? (*)

(*) On peut appliquer le même principe à la nouvelle Messe : ses auteurs la conçurent précisément pour qu’elle soit ambiguë, afin qu’elle puisse avoir le sens d’une cène protestante. Cela est par contre inimaginable avec la Messe traditionnelle, qui n’a pas cette ambigüité, et qui ne peut avoir qu’un sens catholique.

C’est également vrai avec certains documents de Vatican II, qui sont mauvais et inacceptables, du fait de leur ambiguïté.

L’ambigüité est d’autant plus condamnable lorsqu’il y a une obligation grave de faire profession de notre Foi, comme c’est précisément le cas ici avec la « Déclaration doctrinale » de Mgr Fellay. Ne s’agit-il pas précisément de « déclarer » notre Foi et non pas de la cacher ou de favoriser l’erreur ?

 

b. Pour répondre à la deuxième question, il est évident que le Préambule Doctrinal (PD1) du Cardinal Levada du 14 septembre 2011 n’était pas modifiable, au point de le rendre « acceptable ». (*)

(*) C’est l’erreur similaire concernant les documents du Concile Vatican II, dont certains disent qu’il suffirait de les « corriger » afin de les rendre « acceptables ». Le bon sens nous montre que certains des documents conciliaires sont tellement corrompus qu’on ne peut pas les corriger en les rendant bons. Il faut tout simplement les rejeter.

 

La première raison qui nous fait penser que le Préambule de Rome du 14 septembre 2011 n’était pas modifiable est que Mgr Fellay lui-même le pensait !

Si ce Préambule était « modifiable », pourquoi ne l’a-t-il pas fait le 30 novembre 2011 ou en janvier 2012 ?

Mgr Fellay n’a-t-il pas rejeté ce Préambule dans sa lettre du 30 novembre 2011 ? Il l’a ensuite réfuté POINT PAR POINT dans sa lettre du 12 janvier 2012, dans laquelle il dit que son acceptation comporterait une « ambigüité néfaste et sèmerait la confusion » car, dit-il, il  « nous impose toutes les nouveautés sur lesquelles nous avons pourtant exposé les difficultés, les réticences et les oppositions qui demeurent ».

A moins de passer outre le principe de non-contradiction, par lequel une affirmation et son contraire ne peuvent pas être vraies sous le même aspect, Mgr Fellay se contredirait lui-même, et perdrait sa crédibilité, s’il acceptait 95% d’un document qu’il a lui-même réfuté point par point avec des arguments si forts !

Quel « Mgr Fellay » faudrait-il alors croire ? Celui de novembre 2011 et de janvier 2012 avec son PD1, ou celui d’avril 2012 avec sa DD ?

L’on objectera que Mgr Fellay a enlevé les éléments nocifs du Préambule Doctrinal (PD1) de Rome et l’a ainsi transformé dans sa Déclaration Doctrinale, qui devait convenir à la fois Rome et à la Fraternité.

Nous y répondrons plus loin en détail en montrant, point par point, que Mgr Fellay n’a pas modifié substantiellement le Préambule de Rome par sa Déclaration ; il a fait seulement des modifications mineures.

 

La deuxième raison qui nous fait penser que le Préambule Doctrinal (PD1) n’était pas modifiable est qu’il a été rédigé par nos ennemis à Rome. Ses auteurs voulaient clairement emmener la Fraternité, par l’ambiguïté et la ruse, à accepter les reformes conciliaires par « l’herméneutique de la continuité ».

Son langage est peut-être plus « affiné » que dans le passé afin de mieux séduire, mais tout le poison néo-moderniste est bien là.

Il est difficile de croire que Mgr Fellay n’a pas vu le poison dans le texte de Rome dont il s’est servi pour faire le sien. Non seulement il est intelligent, mais aussi sa formation à Ecône et son expérience acquise en étudiant les erreurs modernes ne permettent pas d’imaginer qu’il était inconscient du problème.

La faute impardonnable de Mgr Fellay est donc de penser qu’il pouvait « transformer » ce Préambule du 14 septembre 2011 en sa propre Déclaration, sans changer la « substance » de ce Préambule, comme lui demandait le Cardinal Levada !

La preuve a posteriori que cette Déclaration n’était pas bonne c’est qu’elle créa une opposition jamais vue dans la Tradition, ce qui ne fut pas le cas avec son Préambule Doctrinal du 30 novembre 2011 (PD2) ! Si « l’arbre » était « bon », pourquoi a-t-il produit des réactions si violentes ?

Mgr Fellay et ses conseillers ont eu du mal à « prendre la température » de cette opposition interne à la Déclaration Doctrinale, car ils n’ont jamais compris(?) que cette réaction dans la Tradition venait, non pas de « préjugés », mais du refus de beaucoup à s’identifier avec un texte qui « sentait » le Modernisme. Ils se refusèrent à reconnaître que son contenu est inacceptable.

Et encore aujourd’hui, malgré quelques reculs « stratégiques », Mgr Fellay s’entête à dire qu’il n’y avait rien de mal avec le contenu de sa Déclaration, mais seulement qu’à cause de réactions opposées dans la Tradition, il décidait de le « retirer », mais pas de le « rétracter ».

 

3. LES RAISONS AVANCEES PAR MGR FELLAY POUR JUSTIFIER CETTE DECLARATION

Ne pouvant lire dans les consciences, nous ne pouvons pas connaître avec certitude les motivations internes de Mgr Fellay lors de la rédaction de cette mauvaise Déclaration Doctrinale, mais nous pouvons étudier les raisons officielles qu’il donne pour expliquer cet acte. Nous pouvons aussi être éclairés par les agissements publics du supérieur général de la Fraternité.

Dans la note explicative du Cor Unum 104 présentant sa Déclaration Doctrinale, Mgr Fellay justifie ainsi son choix de remplacer le PD2 du 30 novembre 2011 par une Déclaration totalement ambiguë et équivoque afin de plaire à Rome :

          La peur des sanctions.

          Une fausse conception de l’Église.

 

a. La peur des sanctions.

Nous avons déjà parlé de la menace de possibles « sanctions » venant de Rome énoncées par le Cardinal Levada dans sa lettre du 16 mars si la Fraternité ne revenait pas au Préambule de Rome du 14 septembre 2011.

L’intimidation de la Rome moderniste a marché ! La peur, surtout si elle apparaît « imminente », amène souvent les gens à céder…(*)

(*) Peut-on excuser Mgr Fellay d’avoir agi ainsi, en cédant peut-être à la peur(?) des sanctions ?

Toute peur n’excuse pas la responsabilité morale, surtout lorsqu’il s’agit de profession publique de la Foi, comme c’est le cas ici, sinon, il n’y aurait jamais de martyrs…

Pourquoi tant de peur de la part de Mgr Fellay, et de ses assistants, en face de ces possibles « sanctions » ?

Peut-être que cela vient d’abord du fait que depuis la levée des « excommunications » en 2009, Mgr Fellay a commencé à se sentir un peu plus dans la « légalité », et il est donc maintenant « terrorisé » à l’idée de se trouver à nouveau « condamné » par l’Église officielle.

Mgr Fellay voudrait-il tellement être reconnu par l’Église officielle, qu’il ne supporterait pas que ce ralliement soit maintenant compromis par de nouvelles « sanctions » ?

Contrairement à Mgr Lefebvre, pour qui l’« excommunication » en 1988 le laissait indifférent, Mgr Fellay donne trop d’importance à être « condamné » par Rome.

Si son « légalisme » invétéré l’amène déjà à se sentir « coupable » de se trouver en marge de l’Eglise officielle, à plus forte raison voudra-t-il éviter de se trouver encore « condamné » par l’Eglise officielle !

Considérerait-il que ces possibles nouvelles « sanctions » seraient valides s’il refusait de revenir sur le Préambule de Rome?

Il faut croire que oui, à en juger par ses affirmations tirées de la Note introduisant sa Déclaration doctrinale dans Cor Unum 104 :

« Le cardinal Levada ajoute que notre rejet du Préambule doctrinal approuvé par Benoît XVI équivaut à une rupture de la communion avec le Pontife romain, ce qui entraîne les sanctions canoniques encourues pour schisme. (…) [la DD] ne voulait que les compléter sur un point particulier : l’accusation de schisme ».

En tout cas, son bras droit, l’abbé Pfluger est plus explicite sur ce sentiment de « culpabilité » de la Fraternité car non reconnue par l’Église conciliaire :

« Quant à nous, nous souffrons aussi d’un défaut, du fait de notre irrégularité canonique. Ce n’est pas seulement l’état de l’Église postconciliaire qui est imparfait, le nôtre l’est aussi. (…) L’obligation d’œuvrer activement pour surmonter la crise, ne peut être contestée. Et cette œuvre commence chez nous, en voulant surmonter notre état canonique anormal. » (Kirchliche Umschau, 17 oct. 2012)

Ces sentiments de culpabilité sont bien loin de cette une excellente analyse faite par M. l’abbé de Cacqueray sur les « menaces » de Rome :

« On comprendra, dès lors, que cette interminable palinodie finisse par nous laisser de marbre et par discréditer à nos yeux ceux qui manient avec tant de facilité la carotte et le bâton... À être excommunié, puis « dés-excommunié », à être de nouveau menacé d’être excommunié, on finit par ne plus guère être impressionné par ces coups de théâtre et toutes ces volte-face.

Nous avons tant de raisons d’estimer ces peines injustes, nulles et non avenues ! Elles sont déconsidérées à nos yeux. D’abord, nous gardons le souvenir de 1988. C’est par l’excommunication que fut récompensé le signalé service rendu par Mgr Marcel Lefebvre à la sainte Église en la pourvoyant de quatre excellents évêques catholiques, grâce à qui la transmission du sacerdoce catholique s’est fortifiée. Nous avons, à cette occasion, constaté comment, par un mystère d’iniquité, les meilleurs serviteurs de l’Église se trouvent maltraités. » (Fideliter 208, juill.-août 2012)

Voici ce que Mgr Lefebvre pensait de l’église conciliaire :

« L’église qui affirme de pareilles erreurs (liberté de conscience…)est à la fois schismatique et hérétique. Cette église conciliaire n’est donc pas catholique. Dans la mesureoù le Pape, les évêques, prêtres, fidèles adhérent à cette nouvelle église ils se séparent de l’Eglise Catholique». (Ecône, 29 juin 1976).

Il est triste de constater que Mgr Fellay, au lieu d’avoir choisi l’intransigeance de la Foi et l’éventualité de « condamnations » apparentes et nulles, préfère chercher une « légalité » apparente et finit par céder à la peur. On ne peut pas dire que cette façon d’agir soit héroïque

Et ce qui est grave, c’est qu’en répondant « favorablement » à Rome, comme nous allons le voir, il cède sur des questions fondamentales de doctrine.

Tout cela trahit en lui un manque de conviction dans nos positions doctrinales, car il accepte « sous condition » dans sa Déclaration Doctrinale les trois piliers de « l’église conciliaire » : le concile, la nouvelle Messe et le nouveau Code !

 

b. Une fausse conception de l’Eglise.

Si Mgr Fellay accepte de répondre favorablement à Rome avec sa Déclaration doctrinale c’est parce qu’il y a une raison « doctrinale » derrière cette décision : pour lui l’église conciliaire est l’Église Catholique, c’est le Corps mystique du Christ !

C’est un sujet très vaste qui mériterait une réfutation plus longue, mais qu’il suffise ici d’exposer et de réfuter brièvement ce faux raisonnement.

Le problème est que Mgr Fellay identifie les hommes d’église, les palais, les temples, l’apparat externe de « l’église conciliaire » avec l’Église Catholique… Il appelle souvent « l’église conciliaire » (expression qu’il n’utilise plus) l’Eglise « concrète », l’Eglise « réelle ». (*)

(*) les expressions de Mgr Fellay ne sont pas théologiques, et d’ailleurs ne signifient pas grand-chose, car nous pourrions dire que les fausses églises sont aussi « concrètes » ou « réelles »… !

L’expression « l’église conciliaire », conçue par le Cardinal Benelli, dans une lettre à Mgr Lefebvre, le 25 juin 1976, trahit le projet moderniste et franc-maçon de créer une vraie « nouvelle église » qui n’est pas l’Église catholique.

Mgr Fellay a-t-il oublié que ce sont les marques visibles théologiques de l’Eglise qui identifient l’Église Catholique, et non pas l’apparat externe ?

Mgr Fellay le disait explicitement dans une conférence au Séminaire St Curé d’Ars :

« L’identification entre l’Eglise officielle et l’Eglise moderniste, c’est une erreur, parce que nous parlons d’une réalité concrète. » (Flavigny, 16 février 2009)

Alors que Mgr Lefebvre avait tout une autre position :

« L’Eglise visible se reconnaît aux signes qu’elle a toujours donnés pour sa visibilité : elle est une, sainte, catholique et apostolique. Je vous demande : où sont les véritables marques de l’Eglise ? Sont-elles davantage dans l’Église officielle (il ne s’agit pas de l’Église visible, il s’agit de l’Église officielle) ou chez nous, en ce que nous représentons, ce que nous sommes ? Il est clair que c’est nous qui gardons l’unité de la foi, qui a disparu de l’Église officielle. Ces signes ne se trouvent plus chez les autres… Ce n’est pas nous qui sortons de l’Église mais les modernistes. Quant à dire ‘‘sortir de l’Église visible’’, c’est se tromper en assimilant Église officielle et Église visible. Nous appartenons bien à l’Église visible, à la société des fidèles sous l’autorité du Pape, car nous ne récusons pas l’autorité du Pape, mais ce qu’il fait… Sortir, donc, de l’Église officielle ? Dans une certaine mesure, oui, évidemment. » (Conférence aux prêtres, Ecône, 9 sept. 1988)

« C’est nous qui sommes l’Église visible. (…) Ce sont les autres qui n’en font plus partie » (Interview dans Le Choc, n° 6, Paris 1989).

Ainsi donc, si nous suivons la « logique » de Mgr Fellay : puisque « l’église conciliaire » et l’Eglise Catholique sont identiques, il faut chercher la « réconciliation » avec la Rome actuelle. Mgr Fellay arrive même à donner à cette « réconciliation » un motif à la fois « dogmatique » et moral (de conscience), faute de quoi nous pécherions gravement.

 

B. ANALYSE DE LA DÉCLARATION DOCTRINALE EN PARTICULIER.

1. Le Texte de la Déclaration Doctrinale.

Afin de faire une comparaison rapide entre la Déclaration Doctrinale (DD) du 15 avril 2012 et le Préambule Doctrinal (PD1) de Rome du 14 septembre 2011, nous avons souligné le texte ajouté par Mgr Fellay.

Nous signalerons aussi plus loin ce que Mgr Fellay a enlevé au Préambule Doctrinal de Rome, à partir duquel il a rédigé sa Déclaration.

Voici le texte intégral de la Déclaration Doctrinale (DD) présentée par Mgr Fellay à Rome le 15 avril 2012 :

 

I. Nous promettons d’être toujours fidèles à l’Eglise catholique et au Pontife romain, son Pasteur suprême, Vicaire du Christ, successeur de Pierre et chef du Corps des évêques.

II. Nous déclarons accepter les enseignements du Magistère de l’Eglise en matière de foi et de morale, en donnant à chaque affirmation doctrinale le degré d’adhésion requis, selon la doctrine contenue dans le n° 25 de la Constitution dogmatique Lumen Gentium du Concile Vatican II (Cf. aussi la nouvelle formule de la Profession de foi et du Serment de fidélité pour assumer une charge exercée au nom de l’Eglise, 1989 ; cf. CIC cann. 749 ; 750, 1et 2 ; 752 ; CCEO cann. 597 ; 598, 1 et 2 ; 599)

III. En particulier :

1. Nous déclarons accepter la doctrine sur le Pontife romain et sur le Collège des évêques, avec son chef, le Pape, enseignée par la Constitution dogmatique Pastor æternus du Concile Vatican I et par la Constitution dogmatique Lumen Gentium du Concile Vatican II, chapitre 3 (De constitutione hierarchica Ecclesiæ et in specie de episcopatu), expliquée et interprétée par la Nota explicativa prævia à ce même chapitre.

2. Nous reconnaissons l’autorité du Magistère auquel seul est confié la tâche d’interpréter authentiquement la Parole de Dieu écrite ou transmise (Cf. Pie XII, encyclique Humani Generis) dans la fidélité à la Tradition, se souvenant que « le Saint Esprit n’a pas été promis aux successeurs de Pierre pour qu’ils fassent connaître, sous sa révélation, une nouvelle doctrine, mais pour qu’avec son assistance ils gardent saintement et expriment fidèlement la révélation transmise par les Apôtres, c’est-à-dire le dépôt de la foi » (Vatican I, Constitution dogmatique, Pastor aeternus, Dz. 3070).

3. La Tradition est la transmission vivante de la Révélation « usque ad nos » (Concile de Trente, Dz. 1501 : « Toute vérité salutaire et toute règle morale (Mt. XVI, 15) sont contenues dans les livres écrits et dans les traditions non écrites qui, reçues par les Apôtres de la bouche du Christ lui-même ou transmises comme de la main à la main par les Apôtres sous la dictée de l’Esprit Saint, sont parvenues jusqu’à nous. ») et l’Eglise dans sa doctrine, dans sa vie et dans son culte, perpétue et transmet à toutes les générations ce qu’elle est et tout ce qu’elle croit. La Tradition progresse dans l’Eglise avec l’assistance du Saint Esprit (Cf. Concile Vatican II, Constitution dogmatique Dei Verbum, 8 et 9, Denz.4209-4210), non comme une nouveauté contraire. (Vatican I, Constitution dogmatique Dei Filius, Dz. 3020 : « Aussi doit-on toujours retenir le sens des dogmes sacrés que la sainte Mère l’Eglise a déterminé une fois pour toutes, et ne jamais s’en écarter sous le prétexte et au nom d’une intelligence supérieure de ces dogmes. Croissent donc et se multiplient abondamment, dans chacun comme dans tous, chez tous les hommes aussi bien que dans toute l’Eglise, durant le cours des âges et des siècles, l’intelligence, la science et la sagesse ; mais seulement dans le rang qui leur convient, c’est-à-dire dans l’unité du dogme, de sens et de manière de voir (St. Vincent de Lérins, Commonitorium, 28). ») mais par une meilleure compréhension du depositum fidei (Vatican I, Constitution dogmatique Dei Filius, Dz. 3011 ; Serment antimoderniste, nº 4 ; Pie XII, Lettre encyclique Humani Generis, Dz 3886 ; Concile Vatican II, Constitution dogmatique Dei Verbum, 10, Dz. 4213).

4. L’entière Tradition de la foi catholique doit être le critère et le guide de la compréhension des enseignements du Concile Vatican II, lequel à son tour éclaire –c’est-à-dire approfondit et explicite ultérieurement– certains aspects de la vie et de la doctrine de l’Eglise, implicitement présents en elle ou non encore formulés conceptuellement. (Comme par exemple l’enseignement de la sacramentalité de l’épiscopat in Lumen Gentium, n° 21).

5. Les affirmations du Concile Vatican II et du Magistère pontifical postérieur relatives à la relation entre l’Eglise catholique et les confessions chrétiennes non-catholiques, ainsi qu’au devoir social de religion et au droit à la liberté religieuse, dont la formulation est difficilement conciliable avec les affirmations doctrinales précédentes du Magistère, doivent être comprises à la lumière de la Tradition entière et ininterrompue, de manière cohérente avec les vérités précédemment enseignées par le Magistère de l’Eglise, sans accepter aucune interprétation de ces affirmations qui puisse porter à exposer la doctrine catholique en opposition ou en rupture avec la Tradition et avec ce Magistère.

6. C’est pourquoi il est légitime de promouvoir par une légitime discussion l’étude et l’explication théologique d’expressions et de formulations du Concile Vatican II et du Magistère qui a suivi, dans le cas où elles ne paraissent pas conciliables avec le Magistère antérieur de l’Eglise (On trouve un parallèle dans l’histoire avec le Décret des Arméniens du Concile de Florence, où la porrection des instruments était indiquée comme matière du sacrement de l’Ordre. Néanmoins les théologiens discutèrent légitimement, même après ce décret, sur l’exactitude d’une telle assertion ; finalement la question fut résolue d’une autre façon par le pape Pie XII).

7. Nous déclarons reconnaître la validité du sacrifice de la Messe et des Sacrements célébrés avec l’intention de faire ce que fait l’Eglise selon les rites indiqués dans les éditions typiques du Missel romain et des Rituels des Sacrements légitimement promulgués par les papes Paul VI et Jean-Paul II.

8. En suivant les critères énoncés ci-dessus (III, 5), ainsi que le canon 21 du Code, nous promettons de respecter la discipline commune de l’Eglise et les lois ecclésiastiques, spécialement celles qui sont contenues dans le Code de droit canonique promulgué par le pape Jean-Paul II (1983) et dans le code de droit canon des Eglises orientales promulgué par le même Pontife (1990), restant sauve la discipline à concéder à la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X par une loi particulière.

 

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2. Suppressions et ajouts dans la Déclaration Doctrinale (DD) de Mgr Fellay.

a. Suppressions par rapport au Préambule Doctrinal (PD1) proposé par Rome.

Dans sa Déclaration Doctrinale (DD), Mgr Fellay supprima seulement UN SEUL PASSAGE ET UNE NOTE, au No. 2 du paragraphe III, du Préambule Doctrinal (PD1) du Cardinal Levada :

          Le texte : « tel que l’expose le Catéchisme de l’Église catholique (cf. nn. 813-822 ; 2104-2109) ».

          La note à la fin du paragraphe tirée de la Lettre Cum Jam, de Paul VI du 21 septembre 1966, in AAS 58 (1966) 879 dans laquelle il appelait à voir la doctrine du Concile Vatican II en continuité avec le Magistère précédent.

A part cela, TOUT LE RESTE DU TEXTE du Préambule du Cardinal Levada a été conservé !

Le fait que certains passages ont été déplacés à d’autres endroits donne la fausse impression que les deux documents diffèrent substantiellement…

 

b. Ajouts par rapport au Préambule Doctrinal du 14 septembre 2011 (PD1) proposé par Rome.

Les ajouts sont les suivants :

          Dans III, 2 concernant l’autorité du Magistère Mgr Fellay a ajouté ceci « se souvenant que « le Saint Esprit n’a pas été promis aux successeurs de Pierre pour qu’ils fassent connaître, sous sa révélation, une nouvelle doctrine, mais pour qu’avec son assistance ils gardent saintement et expriment fidèlement la révélation transmise par les Apôtres, c’est-à-dire le dépôt de la foi » (Vatican I, Constitution dogmatique, Pastor aeternus, Dz. 3070). »

          Dans III, 3, concernant la transmission de la Tradition, à la phrase « La Tradition progresse dans l’Eglise avec l’assistance du Saint Esprit » (Cf. Dei Verbum, 8 et 9), Mgr Fellay a ajouté «  non comme une nouveauté contraire, mais par une meilleure compréhension du depositum fidei » [avec une citation de Dei Filius, du Concile Vatican I, Denz. 3020, du Serment Antimoderniste, d’Humani generis de Pie XII et de Dei Verbum de Vatican II (sic)];

          Dans III, 6 Mgr Fellay a ajouté une note se référant au Concile de Florence, concernant « l’étude et l’explication théologique d’expressions et de formulations du Concile Vatican II et du Magistère qui a suivi, dans le cas où elles ne paraissent pas conciliables avec le Magistère antérieur de l’Eglise »

 

On remarque sans difficulté que, tant la seule suppression comme les trois ajouts mentionnés, ne changent pas la SUBSTANCE du Préambule proposé par Rome.

En cela, Mgr Fellay s’est conformé à ce que le Cardinal Levada avait demandé dans sa lettre accompagnant le Préambule Doctrinal : « La Congrégation reste disposée à prendre en considération des demandes de précision ou des suggestions destinées à améliorer la qualité de ces textes, restant sauve leur substance ».

Ce fait, vérifiable, contredit ce qu’affirment Mgr Fellay et ses défenseurs, qui prétendent que la Déclaration Doctrinale diffèrerait essentiellement du Préambule de Rome.

Nous allons prouver cette contradiction avec une analyse, point par point, de la Déclaration.

 

3. Analyse interne de la Déclaration Doctrinale du 15 avril 2012.

Regardons maintenant en détail le texte de la Déclaration Doctrinale (DD) de Mgr Fellay du 15 avril 2012.

Dans chaque point, et afin de montrer la contradiction flagrante entre « Fellay 1 » et « Fellay 2 », nous ajouterons les critiques que Mgr Fellay lui-même avait fait (30 novembre 2011 et du 12 janvier 2012) au Préambule de Rome, mais dont il reprend presque tout le texte dans sa Déclaration.

 

1)      Le Paragraphe I, parle de la fidélité à l’Eglise et au Pape :

« Nous promettons d’être toujours fidèles à l’Eglise catholique et au Pontife romain, son Pasteur suprême, Vicaire du Christ, successeur de Pierre et chef du Corps des évêques. »

 

Les paragraphes I et II de la Déclaration sont très importants, car ils définissent, pour ainsi dire, les principes doctrinaux de la Déclaration, alors que le paragraphe III est l’application pratique de ces principes.

Ce texte ne pose pas de problème en soi, c’est-à-dire, en temps normal.

Nous répondrons plus loin, dans les Réponses aux objections, à ceux qui essayent de justifier la DD en disant que certains passages, comme celui-ci, se trouvaient dans le Protocole d’accord signé et ensuite rétracté par Mgr Lefebvre en 1988.

D’abord, peut-on parler de « fidélité à l’Eglise et au Pape » sans en faire aucune restriction, distinction ou précision ? Au contraire, comme nous le verrons, il est dit que cette fidélité est promise pour « toujours ».

On ne promet pas la fidélité à des personnes ou à des institutions en abstrait, mais toujours en concret, et il s’agit ici de promettre toujours la fidélité à un « pape conciliaire » qui, bien qu’il soit également le chef de l’Eglise catholique, est aussi de facto le chef de l’« église conciliaire » !

En d’autres mots, on ne peut pas promettre d’être fidèle à des personnes qui ne sont pas elles-mêmes fidèles à l’Eglise Catholique et à leurs prédécesseurs !

Car, que l’on veuille ou pas, cette profession de fidélité se situe dans un contexte bien concret : la crise de l’Eglise, en 2012, dont les responsables de cette crise sont, ni plus ni moins, que les mêmes autorités à qui Mgr Fellay promet de se soumettre !

Cette distinction entre le Pape, en tant que vrai successeur des Apôtres, et en tant que chef de file de l’église néo-moderniste et néo-protestante, Mgr Lefebvre l’exprimait ainsi dans sa fameuse Déclaration du 21 novembre 1974 :

« Nous adhérons de tout cœur, de toute notre âme à la Rome catholique, gardienne de la foi catholique et des traditions nécessaires au maintien de cette foi, à la Rome éternelle, maîtresse de sagesse et de vérité.

Nous refusons par contre et avons toujours refusé de suivre la Rome de tendance néo-moderniste et néo-protestante qui s’est manifestée clairement dans le concile Vatican II et après le concile dans toutes les réformes qui en sont issues. »

Mgr Lefebvre aussi commençait sa Lettre aux futurs évêques en 1987 en disant que « La chaire de Pierre et les postes de Rome étant occupés par des antéchrists …»

On voit mal la Fraternité faire ici cette promesse de fidélité à l’autorité « en soi », alors que dans la réalité nous avons affaire à des autorités qui travaillent à détruire ce que nous voulons bâtir !

Enfin, on peut ajouter que le terme « toujours » de cette formule est quelque peu déplacé et excessif, car notre fidélité au pape actuel est conditionnée à sa fidélité à Dieu, à ses prédécesseurs et à l’Église de toujours. Comment peut-on promettre d’être « toujours » fidèle à un pape qui habituellement s’écarte de la fidélité à Dieu, à ses prédécesseurs et à l’Église de toujours ?

Donc, Mgr Fellay dans ce Paragraphe I est au moins ambigu, car il manque de faire les distinctions nécessaires entre le Pape en tant que chef de l’Eglise Catholique, et la même personne, chef de « l’église conciliaire ».

 

2)      Le Paragraphe II parle de la soumission aux enseignements du Magistère, selon la doctrine conciliaire du n° 25 de Lumen gentium :

« Nous déclarons accepter les enseignements du Magistère de l’Eglise en matière de foi et de morale, en donnant à chaque affirmation doctrinale le degré d’adhésion requis, selon la doctrine contenue dans le n° 25 de la Constitution dogmatique Lumen Gentium du Concile Vatican II ». (Cf. aussi la nouvelle formule de la Profession de foi et du Serment de fidélité pour assumer une charge exercée au nom de l’Eglise, 1989 ; cf. CIC cann. 749 ; 750, 1et 2 ; 752 ; CCEO cann. 597 ; 598, 1 et 2 ; 599)

 

Ce texte pose deux problèmes :

          D’abord, le texte lui-même;

          Ensuite, la note en bas de page concernant l’acceptation de la Profession de foi et du Serment de fidélité de 1989, ainsi que des citations du nouveau Code de droit canon.

 

a. Le n° 25 de Lumen gentium.

Certains justifient l’appel au n°25 de Lumen gentium, car il avait été utilisé dans le Protocole d’accord de 1988. (Cf. Objections)

En soi, le texte du N° 25 de Lumen gentium ne poserait pas de problème, car il est basé en majeure partie sur la doctrine des conciles de Trente et de Vatican I, qui sont cités.

Mais dans le contexte il reste quand même un texte à rejeter car il s’insère dans la doctrine conciliaire.

On reproche à ce texte de Lumen gentium ce que dit l’abbé Alvaro Calderon, professeur au séminaire de la Fraternité en Argentine :

« Pouvons-nous au moins racheter ce texte ? Non, certainement, puisque dans le chapitre précédent ce même document a subordonné l’office hiérarchique au sensus fidei, ce qui oblige à entendre la doctrine du n°25 d’une manière très différente à ce qui a été enseigné par Vatican I ». (La Lampara Bajo del Celemin – La lampe sous le boisseau)

Mais ce texte pose aussi un problème grave dans son application pratique.

Dans une situation normale de l’Église il est parfaitement acceptable (c’est même un devoir) de se soumettre aux enseignements du Magistère de l’Eglise.

Mais dans la situation anormale actuelle de l’Eglise, où les Papes postconciliaires n’enseignent plus la saine doctrine, ce principe ne peut plus s’appliquer, car cela équivaudrait à se soumettre au « magistère conciliaire et postconciliaire » en leur signant un « chèque en blanc » !

C’est ce qui d’ailleurs va être demandé plus précisément dans le paragraphe III.

 

b. La nouvelle Profession de Foi et le Serment de Fidélité de 1989.

Il n’est pas inutile de rappeler l’importance et la gravité de faire une Profession de foi et de prêter un Serment de fidélité.

Ces deux actes publics, souvent posés avec grande solennité, parfois devant le Saint Sacrement, comportent des obligations graves en conscience et sous peine de péché mortel, car on prend Dieu, et pas seulement les hommes, comme témoin de ce que nous disons.

Et puisqu’il s’agit ici d’expressions publiques de notre foi et de notre obéissance aux supérieurs légitimes de l’Église, elles ne peuvent pas comporter d’ambiguïté ou d’équivoque, car elles ont comme ultime objet, d’abord la véracité de Dieu, en qui réside le motif de notre foi, et ensuite notre obéissance, qui est due aux hommes à cause de Dieu.

 

Ceci dit, commençons par rappeler que cette nouvelle « Profession de Foi » a remplacé la Profession de Foi traditionnelle du Concile de Trente ou dite de Pie IV !

On se souvient que Mgr Fellay dans son Préambule Doctrinal (PD2) du 30 novembre 2011 avait choisi la Profession de Foi de Trente. Ici, avec sa Déclaration doctrinale, il fait le contraire, il accepte la nouvelle Profession de foi !

Que dit cette nouvelle Profession de Foi ?

Le texte d’introduction de cette nouvelle Profession signale le sens à lui donner:

« Il est apparu donc indispensable de préparer des textes adaptés pour les mettre à jour en ce qui concerne leur style et leur contenu et les mettre plus en phase avec les enseignements de Vatican II et des documents qui en étaient issus. »

C’est surtout le dernier paragraphe de la nouvelle Profession qui pose problème :

« De plus, avec une soumission religieuse de la volonté et de l’intelligence, j’adhère aux doctrines qui sont énoncées, soit par le Pontife romain, soit par le Collège des évêques, lorsqu’ils exercent le Magistère authentique, même s’ils n’ont pas l’intention de les proclamer par un acte définitif ».

Ce dernier texte pose problème dans l’application concrète de la crise de l’Eglise que nous vivons.

Comme les autorités conciliaires, ne peuvent pas prouver que les documents de Vatican II n’appartiennent pas au magistère infaillible, elles font alors appel au « magistère authentique » qui, disent-elles, demande aussi un assentiment interne, de la volonté et de l’intelligence.

Il est vrai qu’en temps normal l’Église a toujours demandé aux fidèles l’acceptation du Magistère authentique, car nous devons la soumission interne aussi à ce qui n’est pas enseigné infailliblement par l’Eglise.

Mais « l’église conciliaire » aujourd’hui fait appel abusivement à cette « soumission » précisément pour imposer tout l’enseignement conciliaire et postconciliaire, comme faisant partie du « magistère authentique », alors qu’il est en rupture grave avec le Magistère authentique traditionnel.

Donc, accepter cette nouvelle Profession de Foi équivaut à signer un « chèque en blanc » aux destructeurs de l’Eglise !

Comment la Fraternité peut-elle continuer à s’opposer aux réformes conciliaires, si Mgr Fellay accepte par cette Profession de se soumettre au « magistère actuel » qui n’a d’autre but que de se « mettre plus en phase les enseignements de Vatican II » ?

Mgr Lefebvre, au contraire, avait des idées claires sur ce qu’il fallait penser de cette nouvelle Profession de foi, dont l’auteur n’était autre que le Cardinal Ratzinger :

« La nouvelle profession de foi qui a été rédigée par le cardinal Ratzinger contient explicitement l’acceptation du Concile et de ses conséquences. (…) Comment pouvons-nous l’accepter ! » (Le Bourget, 19 nov. 1989)

« Les erreurs du Concile et ses réformes demeurent la norme officielle consacrée par la profession de foi du Cardinal Ratzinger de mars 1989 ». (Itinéraire spirituel, p. 10-11)

« C’est là nous mettre dans une contradiction parce que, en même temps que Rome donne à la Fraternité Saint-Pierre, par exemple, ou à l’abbaye du Barroux et à d’autres groupements, l’autorisation de dire la messe de toujours, en même temps on demande aux jeunes prêtres de signer une profession de foi dans laquelle il faut admettre l’esprit du concile. C’est une contradiction ». (Friedrichshafen, 29 avril 1990)

« C’est un fait très grave. Car il demande à tous ceux qui se sont ralliés, ou qui pourraient le faire, de faire une profession de foi dans les documents du Concile et dans les réformes post-conciliaires. Pour nous, c’est impossible ». (Fideliter, janv. 1991, n°79 p. 4)

« Telle qu’elle est, cette formule [de la profession de foi] est dangereuse. Cela démontre bien l’esprit de ces gens avec lesquels il est impossible de s’entendre ». (Fideliter n°70 p. 16, juillet 1989 ; n°73 p. 12 et n°76 p. 11)

Donc, accepter cette nouvelle Profession de foi et vouloir rester fidèle à la Tradition, comme dit Mgr Lefebvre, c’est une contradiction car la Profession suppose d’accepter le Concile et ses réformes.

 

Dans la note mentionnée, Mgr Fellay accepte aussi le « Serment de fidélité » de 1989, qui à son tour a remplacé officiellement dans l’église conciliaire le Serment Anti-moderniste !

L’on se souvient que dans son PD2 du 30 novembre 2011 Mgr Fellay avait pourtant choisi le Serment Anti-moderniste à la place du Serment de fidélité de 1989… En avril 2012 il fait donc encore une fois complètement volte-face !

Donc, si Mgr Fellay laisse de côté le Serment Antimoderniste, qui est l’une de nos meilleures armes contre les néo-modernistes, pour accepter le nouveau Serment de 1989, qui favorise précisément les erreurs modernistes, cela représente un recul considérable dans la résistance de la Fraternité aux erreurs modernes.

 

 

On se souvient de ce que Mgr Fellay écrivait dans « Lettre aux fidèles », où il citait sa propre lettre au cardinal Castrillon Hoyos après la levée des « excommunications » :

« Nous sommes prêts à écrire avec notre sang le Credo, à signer le serment anti-moderniste, la profession de foi de Pie IV ; nous acceptons et faisons nôtres tous les conciles jusqu’à Vatican II, au sujet duquel nous émettons des réserves ». (24 janvier 2009)

Ce n’est donc malheureusement pas la première fois que Mgr Fellay tient des propos contradictoires. Parfois il pense traditionnellement, parfois il accepte des formules de l’église conciliaire, et ce qui est encore plus ambigu, il fait parfois les deux dans un même document !

 

En plus, dans la même note du paragraphe II, sont cités les canons 749 et 750 du nouveau Code de droit canon, qui ont rapport avec le magistère et l’adhésion due à son enseignement, tant infaillible qu’authentique.

Nous avons déjà signalé le fait que les autorités actuelles considèrent les enseignements conciliaires et postconciliaires comme faisant partie du « magistère authentique » de l’Église. Donc, dans la pratique, la Fraternité ne pourrait plus les attaquer. Il ne lui resterait donc plus que la possibilité de les accepter, d’abord tacitement, puis ensuite de plus en plus explicitement, comme l’ont déjà fait les communautés ralliées, les unes après les autres depuis 1988… Le Barroux est un bon exemple de cette évolution.

 

Ainsi donc, lorsqu’on voit les graves concessions faites par Mgr Fellay dans le paragraphe II, on a le droit de se demander : Où sont la fermeté doctrinale  et la prudence surnaturelle que nous avons le droit d’attendre du Supérieur général de la Fraternité ?

Où sont ses soi-disant « grâces d’état » que lui et ses défenseurs ont invoquées pour demander la soumission des membres de la Fraternité ?

Mais il y a pire : nous allons voir comment Mgr Fellay, après avoir accepté dans le paragraphe II la question de principe sur la soumission au « magistère » actuel, devra accepter dans le paragraphe III les applications pratiques de ces faux principes.

 

3)      Le Paragraphe III est incontestablement le pire de tout le document.

Ce paragraphe, le plus long de la Déclaration Doctrinale, traite des applications pratiques concernant les questions controversées sur l’exercice de l’autorité du pape et des évêques, et en particulier sur l’autorité du Magistère conciliaire et postconciliaire en relation avec la Tradition.

C’est vraiment ici, jusqu’à ce compromis, que les théologiens du Cardinal Levada voulaient amener Mgr Fellay, car ce paragraphe traite précisément des points les plus controversés entre la Fraternité et la Rome conciliaire.

Mgr Fellay avait déjà souligné la perfidie du paragraphe III du Préambule de Rome dans sa lettre du 12 janvier 2012 :

« Le point qui cause le plus de difficulté est le paragraphe III (…) ce paragraphe III du Préambule voudrait nous obliger à accepter tous les points qui font difficulté ».

Donc Mgr Fellay était bien conscient du grave danger que représentait ce paragraphe. S’il était si dangereux, il fallait le rejeter totalement.

A première vue, on a l’impression que Mgr Fellay a radicalement « transformé » le paragraphe III du Cardinal Levada, dans un autre sens totalement nouveau, avec des affirmations traditionnelles. Mais ce n’est qu’une apparence

En effet, lorsqu’on compare le paragraphe III de Mgr Fellay avec celui du Cardinal Levada dans le PD1 on constate qu’il y a peu de changements et que ces derniers sont sans réelle importance.

Mgr Fellay a divisé le paragraphe III en sept points, en ajoutant la question sur la nouvelle messe et les nouveaux sacrements.

Voyons maintenant en détail les différents points de ce paragraphe III.

 

● N° 1 : L’AUTORITÉ DU PAPE ET DES ÉVÊQUES.

Mgr Fellay a repris ici, mot par mot, ce que se trouvait dans le PD1 de Rome :

« Nous déclarons accepter la doctrine sur le Pontife romain et sur le Collège des évêques, avec son chef, le Pape, enseignée par la Constitution dogmatique Pastor æternus du Concile Vatican I et par la Constitution dogmatique Lumen Gentium du Concile Vatican II, chapitre III (De constitutione hierarchica Ecclesiæ et in specie de episcopatu), expliquée et interprétée par la Nota explicativa prævia à ce même chapitre ».

Nous avons déjà commenté plus haut les problèmes posés par le n°25 de Lumen gentium qui fait partie du chapitre III, lequel comporte les numéros 18 à 29 inclus. Le numéro 25 demande l’adhésion au magistère ordinaire des évêques, ce qui est en soi conforme à l’esprit de Vatican I mais impossible à cause de la crise actuelle, car les évêques ont un esprit conciliaire. Par contre, dans d’autres passages du chapitre III, il y a une véritable contradiction entre de fausses nouvelles notions (la collégialité) et l’enseignement traditionnel de l’Eglise.

Ce qui est grave, ici, c’est que Mgr Fellay accepte que la doctrine, sur un point si important comme l’autorité du Pape et des évêques, ait comme référence à la fois Vatican I et Vatican II !

Ce fait ne rend pas ce document « meilleur », mais au contraire, plus dangereux, en semant la confusion, car ces documents s’opposent ouvertement.

En fait, ce texte prête à confusion car on ne sait pas si la doctrine dont il parle sur le Pontife romain et les évêques est à attribuer à Vatican I ou à Vatican II… !

Donc, en cas de controverse, ce sera l’enseignement de Vatican II qu’il faudra retenir, car c’est l’autorité actuelle qui exerce le Magistère « vivant ».

S’il y a un point sur lequel Vatican II a rompu avec la Tradition est précisément la nouvelle notion démocratique concernant l’autorité dans l’Eglise, avec l’erreur de la « collégialité« . (*)

(*) La notion traditionnelle enseignait que l’autorité du Pape était « monarchique ».

La hiérarchie de l’Eglise était pour ainsi dire « pyramidale », avec à la pointe le Pape, ensuite les évêques, les prêtres.

Vatican II a préféré s’inspirer de la démocratie moderne et a rendu le pouvoir « consultatif et délibératif » à tous les niveaux, diminuant ou détruisant l’autorité personnelle du pape, des évêques, et même des prêtres dans leurs paroisses…

L’application la plus grave de la collégialité du concile fut d’établir deux pouvoirs suprêmes dans l’Eglise : l’un du Pape seul, l’autre du Pape avec le « collège » des évêques, et ceci d’une manière ordinaire, permanente, et non pas extraordinaire, comme c’est le cas lors des conciles œcuméniques.

Ainsi, la doctrine du chapitre III de Lumen gentium mentionnée ici, contredit l’enseignement traditionnel concernant le sujet de l’autorité suprême dans l’Eglise.

La Nota praevia, qui fut ajoutée à la fin de Lumen gentium, afin essayer de préciser dans un sens plus traditionnel la question de l’autorité suprême dans l’Eglise et de rassurer les évêques conservateurs au concile, n’a plus aucun effet aujourd’hui, car elle n’est plus mentionnée dans le nouveau Code de droit canon, comme Mgr Lefebvre l’avait signalé :

« Dans le nouveau droit canon, il y a deux pouvoirs suprêmes de l’Église : il y a le pouvoir du pape qui a le pouvoir suprême et ensuite le pape avec les évêques. (…) Ça ne s’est jamais vu dans l’Église. (…) C’est donc limiter le pouvoir du pape. Alors, la note explicative du Concile, pratiquement, on n’en tient pas compte dans le nouveau droit canon ». (Conférence Spirituelle à Ecône, 100A, 20 mai 1983)

En cela donc le nouveau Code ne fait que rendre en langage canonique l’erreur de la collégialité enseignée par Lumen gentium.

C’est ici, au chapitre III de Lumen gentium, que réside, au plus haut niveau de l’Eglise, l’erreur conciliaire de la collégialité, et Mgr Fellay l’accepte, alors qu’elle s’oppose précisément à la doctrine de Pastor aeternus de Vatican I !

Voici ce que pourtant disait Mgr Fellay lui-même sur ce point dans sa lettre du 12 janvier 2012 au Cardinal Levada :

«Nous achoppons aussi sur (…) la collégialité, dont le ‘subiectum quoque’ reste un terme ambigu, même éclairci par la Nota praevia (LG 22) ».

Donc Mgr Fellay reconnaissait, trois mois plus tôt, que même avec la Nota praevia, ce passage du n° 25 de Lumen gentium était inacceptable, car ambigu, et maintenant il le trouve acceptable ! 

C’est une fois de plus « Fellay 1 » contre « Fellay 2 » !

 

● N° 2 : L’AUTORITÉ DU MAGISTERE DE L’ÉGLISE.

En particulier dans le rôle d’interprétation du Dépôt de la Révélation (Ecriture sainte et Tradition) :

« Nous reconnaissons l’autorité du Magistère auquel seul est confié la tâche d’interpréter authentiquement la Parole de Dieu écrite ou transmise (Cf. Pie XII, encyclique Humani Generis) dans la fidélité à la Tradition, se souvenant que « le Saint Esprit n’a pas été promis aux successeurs de Pierre pour qu’ils fassent connaître, sous sa révélation, une nouvelle doctrine, mais pour qu’avec son assistance ils gardent saintement et expriment fidèlement la révélation transmise par les Apôtres, c’est-à-dire le dépôt de la foi » (Vatican I, Constitution dogmatique Pastor aeternus, Dz. 3070) ».

La première partie, prise du PD1, est traditionnelle et fait référence à l’encyclique Humani generis de Pie XII.

Ensuite Mgr Fellay ajouta (« se souvenant… ») une citation bien connue de Pastor Aeternus de Vatican I sur les limites du Magistère de l’Eglise, qui rappelle qu’il ne peut pas enseigner « une nouvelle doctrine ».

Il faut remarquer que dans le Préambule corrigé par Rome le 13 juin 2012 (PD3), le Cardinal Levada a accepté cette addition, et il a ajouté la suite de la citation de Pastor Aeternus, concernant la promesse de que le Siège apostolique demeurera « pur de toute erreur ».

Ce texte ne pose pas de problème doctrinal, car il fait appel à deux textes traditionnels.

Il reste tout de même une ambiguïté dangereuse : en acceptant cette autorité magistérielle, malgré les limitations de Pastor Aeternus, dans les conditions actuelles, on accepte de laisser dans les mains du « magistère » actuel l’interprétation de l’Ecriture sainte et la Tradition. Cela sous-entend que nous avons confiance en lui et que nous sommes prêts à nous soumettre. Cela laisse donc la porte grande ouverte aux nouveautés que l’on voudra nous imposer avec l’affirmation qu’elles sont dans la continuité du magistère de l’Eglise.

Qu’en est-il depuis Vatican II ? Peut-on dire que depuis le concile l’Ecriture-sainte et la Tradition ont été correctement interprétées ? Peut-on espérer que cela va changer dans les circonstances actuelles ?

L’évidence nous montre que non, et que cela continuera tant que le « magistère » actuel continue sur la voie

 

● N° 3 : LE « PROGRES » DE LA TRADITION

En particulier comme étant « la transmission vivante de la Révélation » jusqu’à nous :

« La Tradition est la transmission vivante de la Révélation « usque ad nos » (Concile de Trente, Dz. 1501 : « Toute vérité salutaire et toute règle morale (Mt. XVI, 15) sont contenues dans les livres écrits et dans les traditions non écrites qui, reçues par les Apôtres de la bouche du Christ lui-même ou transmises comme de la main à la main par les Apôtres sous la dictée de l’Esprit Saint, sont parvenues jusqu’à nous. ») et l’Eglise dans sa doctrine, dans sa vie et dans son culte, perpétue et transmet à toutes les générations ce qu’elle est et tout ce qu’elle croit. La Tradition progresse dans l’Eglise avec l’assistance du Saint Esprit (Cf. Vatican II, Dei Verbum, 8 et 9), non comme une nouveauté contraire. (Vatican I, Dei Filius, Dz. 3020) mais par une meilleure compréhension du depositum fidei » (Vatican I, Dei Filius, Dz. 3011 ; Serment antimoderniste, nº 4 ; Pie XII, Humani Generis, Dz 3886 ; Concile Vatican II, Dei Verbum, 10).

 

Encore une fois, nous trouvons ici l’ambigüité car deux textes opposés sont placés côte à côte.

Le premier est du concile de Trente, au moins pour ce qui concerne la Tradition comme transmission « jusqu’à nous », mais le mot « vivante » a été ajouté par Rome dans le PD1 de 2011.

L’autre de Vatican II, qui dit : « La Tradition progresse dans l’Eglise avec l’assistance du Saint Esprit ». (Dei Verbum, 8 et 9)

Mgr Fellay a emprunté ce texte du PD1, mais il a ajouté : « non comme une nouveauté contraire, mais par une meilleure compréhension du depositum fidei ».

Cet ajout fut cependant accepté par Rome dans la réponse du 13 juin 2012, mais ils ajoutèrent : « sous la conduite du Magistère, « dont l’autorité s’exerce au nom de Jésus-Christ » (Dei Verbum, 10) ».

 

Il y a deux problèmes ici : (1) la fausse notion moderniste d’une Tradition « vivante » qui « progresse », et (2) le fait qu’au dernier ressort c’est le Magistère actuel qui est le « témoin » autorisé de cette transmission.

(1) Les notions de transmission « vivante » de la Révélation et de la Tradition par le « progrès » des dogmes, sont des erreurs graves, typiquement modernistes.

Voici ce qui disait Saint Pie X dans Pascendi, en citant les Modernistes eux-mêmes :

« Evoluer et changer, non seulement le dogme le peut, il le doit: (…) Les formules religieuses, en effet, pour être véritablement religieuses, non de simples spéculations théologiques, doivent être vivantes, et de la vie même du sentiment religieux; ceci est une doctrine capitale dans leur système, et déduite du principe de l’immanence vitale ». (N° 14)

L’ajout de Mgr Fellay en précisant que le progrès de la Tradition exclut toute « nouveauté contraire » n’a pas rendu pour autant le texte « orthodoxe » pour deux raisons :

          d’abord parce que cet ajout est inopérant, comme nous le verrons dans (2), car en dernière instance ce sera le Magistère actuel qui décidera si les doctrines conciliaires ou postconciliaires représentent une « nouveauté contraire » ou non…

          ensuite, parce que Rome a accepté cet ajout dans la réponse du 13 juin 2012, alors qu’ils professent la notion moderniste d’évolution et de progrès des dogmes.

 

(2) Rien n’empêche donc au « magistère » actuel (dont l’autorité est acceptée par Mgr Fellay, cf. n° 2) de déclarer, d’après « l’herméneutique de la continuité », que les doctrines conciliaires représentent un progrès homogène par rapport à la Tradition, comme par exemple la doctrine de la liberté religieuse.

On comprend mieux pourquoi, sans un rejet clair des erreurs conciliaires, il est impossible et extrêmement imprudent de se mettre à reconnaître l’autorité de leur « magistère ».

Mais citons encore « Mgr Fellay 1 » contre « Mgr Fellay 2 », qui se contredit une fois de plus. Dans la lettre du 12 janvier 2012, à propos du progrès homogène de la Tradition, il disait ceci:

« C’est la pratique du magistère, quand il promulgue quelque nouveauté, de prouver cette continuité avec la Tradition. Ainsi fait-il lorsqu’il proclame un nouveau dogme.

Or le problème n’est pas tant ici la doctrine que le fait : certains textes du concile Vatican II et certaines réformes subséquentes ne cadrent pas avec cette doctrine ».

La contradiction est flagrante entre ces deux positions, car en janvier 2012 il professait la doctrine catholique, mais en avril suivant il professe la doctrine conciliaire !

Quel est donc le vrai « Mgr Fellay » ? Sans doute celui de la DD, car c’est sa position la plus récente, donc finale (car la DD n’a pas été condamnée depuis par Mgr Fellay. Au contraire, il l’a bien présentée, dans la note explicative du Cor unum 104).

 

● N° 4 : LE CRITÈRE D’INTERPRÉTATION ENTRE LA TRADITION ET LES TEXTES DU CONCILE VATICAN II EN GÉNÉRAL.

Voici le texte :

« L’entière Tradition de la foi catholique doit être le critère et le guide de la compréhension des enseignements du Concile Vatican II, lequel à son tour éclaire –c’est-à-dire approfondit et explicite ultérieurement– certains aspects de la vie et de la doctrine de l’Eglise, implicitement présents en elle ou non encore formulés conceptuellement ».

Mgr Fellay reprend ce texte du Préambule de Rome, sans faire aucune modification, mis à part une note ajoutée par lui, concernant la sacramentalité de l’épiscopat, enseignée par Vatican II. Plus tard, Rome n’a rien objecté à ce texte dans la réponse du 13 juin 2012.

L’enjeu ici est très important : comment faut-il entendre cette affirmation que la Tradition « entière » est un critère d’interprétation des enseignements du concile Vatican II ?

Et vice-versa : Est-il vrai que ce même concile « approfondit et explicite » ce qui n’avait été qu’implicitement contenu dans la Tradition ?

On peut dire qu’il s’agit ici du « concile à la lumière de la Tradition », mais aussi de « la Tradition à la lumière du concile » !

Dans ce paragraphe de la déclaration doctrinale on traite cette question d’une façon générale, c’est-à-dire, la question du principe de cette double relation. Dans le n° suivant l’on traitera plus spécifiquement des doctrines enseignées par le concile.

 

La première partie du texte (la Tradition comme critère d’interprétation de Vatican II) serait vraie si on l’entendait du point de vue traditionnel, c’est-à-dire : la Tradition juge les enseignements erronés du concile Vatican II et les condamne.

Mais ce texte est ambigu, car ce n’est pas cela que voulaient signifier les auteurs de ce passage… En effet, Mgr Fellay a emprunté ces lignes au Préambule de Rome.

D’abord, on se demande pourquoi parler d’« entière Tradition ». Ce n’est pas une expression théologique traditionnelle, car cela laisserait entendre qu’il ne s’agit pas seulement de la Tradition d’avant Vatican II, mais aussi pendant et après le concile, afin de l’étendre jusqu’à nos jours.

On comprend maintenant pourquoi Benoît XVI, dans son décret de la levée des « excommunications », affirmait que le Concile Vatican II : « renferme l’entière histoire doctrinale de l’Eglise ».

Car, comme nous l’avons avons vu dans le n° 3, selon la conception moderniste, la « Tradition » est « vivante » et « progresse » continuellement ; elle ne s’est pas arrêtée avant Vatican II, mais elle continue de progresser aujourd’hui.

Donc, parler de Vatican II comme appartenant à « l’entière Tradition », n’est qu’une manière détournée d’approuver « l’herméneutique de la continuité ».

On voit ici Mgr Fellay se contredire encore. Il disait dans sa lettre du 12 janvier 2012 qu’il avait un problème avec « l’application de ce principe [du critère d’interprétation du Concile Vatican II] aux nouveautés du concile qui sont clairement en rupture ou discontinuité avec le Magistère de toujours », mais depuis le 15 avril 2012, il affirme implicitement dans la DD que les nouveautés du concile font partie de « l’entière tradition ».

 

La deuxième partie est ouvertement fausse et pernicieuse.

Comment Mgr Fellay peut-il affirmer que le Concile Vatican II soit une « lumière qui éclaire la vie et la doctrine de l’Eglise », alors que ce concile depuis 50 ans est source de la destruction de l’état de grâce dans les âmes à cause de ses graves contradictions avec la doctrine de l’Eglise ?

Le concile en cela s’attaque aux deux marques visibles de l’Eglise Catholique : la sainteté et l’unité de la Foi.

Les doctrines de Vatican II sont plutôt des ténèbres libérales et modernistes qui obscurcissent la lumière de la Tradition Catholique !

En plus, mis à part la question sur la sacramentalité de l’épiscopat (qui d’ailleurs n’était pas une doctrine commune), Vatican II n’a rien fait qui soit bénéfique pour l’Eglise ! Ce concile est plutôt une « tumeur cancérigène » qui essaie de détruire l’Eglise.

Et l’on peut pas dire non plus que le concile « approfondit et explicite » des concepts « implicitement présents »  dans l’Eglise !

Les trois erreurs principales du concile, la liberté religieuse, la collégialité et l’œcuménisme ne sont contenues ni dans l’Ecriture Sainte ni dans la Tradition.

Il suffit de voir de près les schémas modernistes sur lesquels a travaillé le Concile pour se rendre compte qu’ils manquaient de référence au Magistère traditionnel.

Les trois erreurs principales du Concile, liberté religieuse, collégialité et œcuménisme, trouvent plus exactement leur « inspiration » dans la Révolution Française avec le triple slogan de « liberté, égalité et fraternité » ! C’est ce qu’a d’ailleurs avoué le Cardinal Suenens qui l’appelait « le 1789 dans l’Eglise ».

Le cardinal Ratzinger, dans les principes de la théologie catholique  a dit à propos de Gaudium et spes: « (…) contentons-nous ici de constater que le texte joue le rôle d’un contre-Syllabus dans la mesure où il représente une tentative pour une réconciliation officielle de l’Eglise avec le monde tel qu’il était devenu depuis 1789. » 

http://www.cardinalrating.com/cardinal_84__article_1365.htm

 

 

● N° 5 : LE CRITÈRE D’INTERPRÉTATION ENTRE LA TRADITION ET LES TEXTES DU CONCILE VATICAN II SUR L’ŒCUMÉNISME ET DE LA LIBERTÉ RELIGIEUSE

Voici le texte:

« Les affirmations du Concile Vatican II et du Magistère pontifical postérieur relatives à la relation entre l’Eglise catholique et les confessions chrétiennes non-catholiques, ainsi qu’au devoir social de religion et au droit à la liberté religieuse, dont la formulation est difficilement conciliable avec les affirmations doctrinales précédentes du Magistère, doivent être comprises à la lumière de la Tradition entière et ininterrompue, de manière cohérente avec les vérités précédemment enseignées par le Magistère de l’Eglise, sans accepter aucune interprétation de ces affirmations qui puisse porter à exposer la doctrine catholique en opposition ou en rupture avec la Tradition et avec ce Magistère. »

Nous sommes ici dans la pire partie du pire paragraphe de la Déclaration doctrinale, car elle fait des concessions doctrinales graves aux deux grandes erreurs conciliaires : l’œcuménisme et la liberté religieuse !

Le texte de Mgr Fellay reprend  presque entièrement le N°3 du Préambule de Rome du 14 septembre 2011, mis à part l’expression « dont la formulation est difficilement conciliable », à la place de « pourrait sembler à certains ».

Mgr Fellay accepte donc ici un texte rédigé par des néo-modernistes, qui n’ont qu’une intention, clairement différente de la nôtre : intégrer les doctrines conciliaires dans la Tradition, par « l’herméneutique de la continuité ».

Dans la version corrigée par Rome le 13 juin 2012, le Cardinal Levada reprit le texte original de 2011.

Le n° 5 est la conséquence logique des concessions faites au n°4, où Mgr Fellay avait accepté « la Tradition à la lumière du concile » !

En d’autres termes : si dans le n°4 de la DD, Mgr Fellay acceptait que le concile explicite des doctrines non encore formulées, voici que cela s’applique précisément, dans le n°5, à l’œcuménisme et à la liberté religieuse… !

Ce qui rend spécifiquement inacceptable ce n° 5, c’est qu’il s’agit d’erreurs conciliaires très graves comme l’œcuménisme et la liberté religieuse ; la collégialité ayant été déjà acceptée dans le n° 1.

D’abord, quand Mgr Fellay affirme que c’est seulement la « formulation » des doctrines conciliaires de l’œcuménisme et de la liberté religieuse dont il s’agit ici, et non pas les doctrines elles-mêmes qui sont erronées, il laisse entendre qu’il suffirait de les « éclairer » ou de les « formuler » autrement, et ainsi elles seraient acceptables.

Ensuite, l’expression accepter d’interpréter le concile et le Magistère postérieur  « à la lumière de la Tradition », certes utilisée par Mgr Lefebvre, n’est pas un bon argument. Voici ce qui est expliqué à ce sujet par le Nouvelles de chrétienté n°73 de mars-avril 2002, p.4 :

Certains objecteront que Mgr Lefebvre lui-même a prononcé cette phrase : « J’accepte le Concile, interprété à la lumière de la Tradition ». Il est vrai que Mgr Lefebvre l’a formulée devant le “pape” Jean-Paul II, en octobre 1978. D’abord, ce n’est pas lui qui l’a conçue, mais le Cardinal Ratzinger. Notons cependant qu’il ne l’a pas reprise par la suite et qu’elle n’a pas fait l’objet du protocole d’accord du 5 mai 1988.

En effet, Mgr Lefebvre s’est rendu compte qu’elle n’avait pas la même signification pour la Rome moderniste que pour nous. La réponse donnée par le Cardinal Ratzinger au « Dubia » sur la liberté religieuse ainsi que les entretiens qu’eut Mgr Lefebvre avec ledit Cardinal avant les sacres de 1988 le prouvent abondamment : « Il n’y a plus qu’une seule Eglise, c’est l’Eglise de Vatican II. Vatican II représente la Tradition. » (Paroles du Cardinal Ratzinger, citées par Mgr Lefebvre dans la conférence de presse du 15 juin 1988). »

Il est donc dangereux de citer Jean-Paul II en ce domaine, et vouloir épouser ses propos : « Ce fut le critère également utilisé par le Pape Jean Paul II quand il a parlé de la “ doctrine intégrale du Concile ”, cela veut dire, a-t-il expliqué, que “ la doctrine doit être comprise à la lumière de la Sainte Tradition et rapportée au Magistère constant de la Sainte Eglise ”  (Jean Paul II, discours à la réunion de l’École Sacrée, le 5 novembre 1979). » (*)

(*) Cité dans le document : « Les Prêtres de Campos : Leur reconnaissance par le Saint-Siège », de l’Administration Apostolique personnelle Saint Jean Marie Vianney.

 http://catholicapedia.net/Documents/nouvelles_de_chretiente/Nouvelle_73.pdf

Mgr Fellay fait donc en 2012 ce que Nouvelles de chrétienté considérait comme dangereux en 2002. Reconnaître Vatican II « à la lumière de la tradition » est un argument ambigu, relatif, subjectif, utilisé pour convaincre l’interlocuteur d’esprit traditionnel d’accepter le Concile Vatican II, bien que sa doctrine et son interprétation des mots soient entièrement différentes de la Rome conciliaire !

Donc c’est un argument dangereux (pour reprendre l’expression citée dans Nouvelles de chrétienté n°73), car « accepter » ces affirmations « à la lumière de la Tradition » ne veut pas dire la même chose pour eux que pour nous.

Car, comme Mgr Williamson, le fait remarquer :

« La première partie ici (« doivent être comprises… ») est parfaitement vraie tant qu’elle signifie que toute nouveauté Conciliaire « difficile à concilier » sera immédiatement rejetée si elle contredit objectivement l’enseignement antérieur de l’Église.» (Eleison n° 300 et Lettre ouverte aux prêtres de la FSSPX)

Donc, cette première partie laisserait entendre qu’une contradiction serait possible entre le concile et la Tradition, mais nous verrons que, dans la deuxième partie, on exclut précisément cette possibilité

 

Le poison est donc plus évident dans la deuxième partie, à partir de « sans accepter… »

Voici ce que dit encore Mgr Williamson sur ce texte :

« Mais [la première partie] est directement contredite [lorsqu’il est] dit qu’aucune nouveauté conciliaire ne saurait être « interprétée » comme étant [en opposition ou] en rupture avec la Tradition. » (Eleison n° 300 et Lettre ouverte aux prêtres de la FSSPX)

 

Par ces mots :« sans accepter aucune interprétation… », Mgr Fellay explicite donc d’une façon moderniste ce qu’il entend par « doivent être comprises… » : Il interdit de rejeter quoique ce soit du Concile comme étant en rupture avec la Tradition. Il valide donc ici, implicitement mais très clairement l’herméneutique de la continuité de Benoît XVI.

 

On pourrait conclure pour réfuter cette concession majeure de Mgr Fellay à la liberté religieuse, en rappelant l’importance du combat que mena Mgr Lefebvre contre celle-ci pendant et après le concile. Ce fut en particulier contre cette erreur qu’il écrivit le livre « Pour qu’Il règne », sur le Christ Roi ; un livre écrit exclusivement pour réfuter précisément une seule erreur du concile : la liberté religieuse !

Et sur l’œcuménisme ? Dans cette DD nous sommes bien loin de la fermeté de l’excellente étude faite par la Fraternité en 2004 intitulé « De l’œcuménisme à l’apostasie silencieuse ».

On voit bien que le libéral « Fellay 2 » a pris le dessus sur le traditionnel « Fellay 1 »…

 

● N° 6 : L’OPPORTUNITÉ DES DISCUSSIONS DOCTRINALES

Ce point traite des expressions controversées du Concile Vatican II et du Magistère post-conciliaire :

« C’est pourquoi il est légitime de promouvoir par une légitime discussion l’étude et l’explication théologique d’expressions et de formulations du Concile Vatican II et du Magistère qui a suivi, dans le cas où elles ne paraissent pas conciliables avec le Magistère antérieur de l’Eglise ».

Remarquons que Mgr Fellay a utilisé deux fois le terme « légitime »… Pourquoi n’avoir pas mis « nécessité » à la place de l’expression plus faible « légitimité », car la première implique un devoir des deux parties, alors que la seconde implique seulement convenance ou opportunité des discussions, qui ne seront accordées que si Rome les souhaite ?

On se souvient que depuis 1988 la Rome moderniste a promis à tous les ralliés de « légitimes » discussions, mais qu’aucune discussion formelle n’a jamais été établie entre ces communautés et Rome. De toute façon, les discussions ne risquent pas d’aller très loin… car Rome n’accepte que les discussions sur des points de détail, laissant toujours sauve l’ « orthodoxie » du concile et du « magistère post-conciliaire ». Donc, à quoi bon souhaiter de « légitimes discussions » ?

Cette faiblesse est confirmée dans le texte par l’utilisation des mots « expressions et formulations », ce qui sous-entend que les formulations du concile Vatican II ne touchent pas le contenu et le fond de la doctrine, mais seulement la façon dont celle-ci est formulée. C’est donc finalement une difficulté accidentelle, qui ne remet pas du tout en cause les doctrines conciliaires.

Mgr Fellay n’avait-il pas écrit le 12 janvier, lorsqu’il rejetait le PD1, que « le problème [doctrinal] n’étant pas résolu, vouloir aller plus loin serait bâtir sur une équivoque » et aussi « que reste-t-il de la légitime liberté de discussion de certains points du concile concédée dans la Note préliminaire ? Il nous semble que l’on ne nous laisse plus aucune marge de discussion, ». Et maintenant il semble que tout soit aplani, qu’on puisse continuer à « bâtir sur l’équivoque », sans « aucune marge de discussion » !

A propos de la note se référant au concile de Florence que Mgr Fellay a insérée au n° 6, le supérieur général manque terriblement de réalisme s’il espère obtenir quelque chose d’hypothétiques nouvelles discussions doctrinales avec Rome alors qu’en 2011 elles ont montré que l’accord doctrinal était impossible. A plus forte raison une fois la Fraternité rentrée « dans le bercail conciliaire », les autorités n’auront aucun intérêt à alimenter la « contestation », au moins sur des points essentiels.

 

● N° 7 : SUR LA « VALIDITÉ » ET DE LA « LÉGITIMITÉ » DE LA NOUVELLE MESSE ET DES NOUVEAUX SACREMENTS

Voici le texte de Mgr Fellay :

« Nous déclarons reconnaître la validité du sacrifice de la Messe et des Sacrements célébrés avec l’intention de faire ce que fait l’Eglise selon les rites indiqués dans les éditions typiques du Missel romain et des Rituels des Sacrements légitimement promulgués par les papes Paul VI et Jean-Paul II. »

Ce paragraphe a été tiré presque mot par mot du Protocole d’accord de Mgr Lefebvre de 1988, sauf la mention de la « légitimité de la promulgation » de la nouvelle Messe et des nouveaux sacrements !

Il y a dans ce passage de la Déclaration de Mgr Fellay, une concession majeure aux instruments les plus destructeurs de la piété catholique que sont les nouveaux rites !

Que disait Mgr Fellay sur la même question capitale de la nouvelle Messe seulement cinq mois plus tôt, le 30 novembre 2011, dans le Préliminaire à son PD2 ?

« Au sujet de la messe, nous reconnaissons que le Saint-Siège peut légitimement intervenir sur les rites, mais le Novus Ordo Missae « s’éloigne de façon impressionnante, dans l’ensemble comme dans le détail de la théologie catholique de la Sainte Messe, telle qu’elle a été formulée à la XXIIème session du Concile de Trente, lequel, en fixant définitivement les « canons » du rite, éleva une barrière infranchissable contre toute hérésie qui pourrait porter atteinte à l’intégrité du Mystère. » (Bref Examen critique de la Nouvelle Messe des cardinaux Ottaviani et Bacci). Nous en reconnaissons la validité sacramentelle, mais nous y voyons un mal de par ses déficiences qui expliquent par elles-mêmes en grande partie le désastre liturgique. »

Ceci est orthodoxe, mais la contradiction est flagrante entre ce que Mgr Fellay écrivait ici, et ce qu’il écrira dans la DD du 15 avril 2012 !

Que faut-il penser à propos de la validité et de la licéité de la nouvelle Messe et des nouveaux sacrements ?

Mgr Lefebvre avait toujours admis que, les conditions essentielles pour l’intégrité des sacrements étant sauves, il se peut que la nouvelle Messe et les nouveaux sacrements soient valides d’une façon générale, quoique cas par cas ils soient de plus en plus invalides.

Mais une autre chose est d’admettre que ces rites sont légitimes, car dire, comme Mgr Fellay, qu’ils ont été « légitimement promulgués » équivaut à accepter que ces rites sont bons.

Voici ce que disait Mgr Lefebvre sur ce point de la légitimité de la nouvelle Messe :

« Nous ne disons pas que la nouvelle messe est hérétique, ni qu’elle est invalide, mais nous refusons de dire qu’elle est légitime, qu’elle est parfaitement orthodoxe. » (Communicantes, aout 1985)

Beaucoup d’excellentes études théologiques ont été écrites démontrant les déficiences graves des nouveaux rites, pour qu’on s’attarde ici à les répéter.

Qu’il suffise seulement de nous pencher sur cette question de la licéité ou légitimité de ces nouveaux rites, car récemment Mgr Fellay et ses défenseurs essayent de jouer sur les mots en prétendant qu’affirmer que ces nouveaux rites sont « légitimement » promulgués n’impliquent pas qu’ils soient « licites »

A moins que l’on tombe dans le nominalisme et que les mots n’aient pas de signification précise, commençons par citer la définition que donne le Petit Larousse du mot « légitimité » : « la qualité de ce qui est fondé en droit, en justice, ou en équité ».

Or, si légitimité est la « qualité » de ce qui est fondé sur le droit, une chose est aussi « légale » lorsqu’elle est conforme à la loi.

Si nous passons au langage canonique, comme c’est le cas ici, il n’y pas de différence de signification entre « légitime » et « licite », car la « licéité » d’un acte sacramentel est basée sur la « légitimité » de la loi liturgique qui le promulgue.

Donc, une fois admis, comme le fait Mgr Fellay, que les nouveaux rites ont été « légitimement promulgués », il implique par-là que les lois qui les ont « promulgués » sont bonnes, car en droit canonique une loi pour être légitime doit être bonne !

Et si leur promulgation est « légitime », rien n’empêche que leur célébration soit aussi licite et bonne.

On peut alors objecter à Mgr Fellay : si la « promulgation » des lois établissant les nouveaux rites est légitime, et donc bonne, pourquoi ne célèbre-t-il la nouvelle Messe ou n’administre-t-il pas les nouveaux sacrements ?

En fait, au sujet de la licéité des nouveaux rites, Mgr Fellay est pris au piège à cause d’une concession majeure qu’il a faite à Rome : l’acceptation du nouveau Code de droit canon ! Il est forcé à partir de là, d’être « logique » avec lui-même. Il serait « incohérent » d’accepter le nouveau Code, et de refuser de reconnaître la légitimité de la promulgation des nouveaux rites qui sont institutionnalisés dans le nouveau code … !

Toutes les communautés de ralliés sont passées par là… elles ont commencé par reconnaître cette « légitimité » des nouveaux rites, et plus tard leurs supérieurs n’ont pas hésité à concélébrer la nouvelle Messe avec le Pape, comme le firent publiquement Dom Gérard, Mgr Rifan, l’abbé Wach et d’autres…

A quand donc la concélébration de Mgr Fellay dans le nouveau rite avec le Pape, si celui-ci le lui demande ?

 

● N° 8 : L’ACCEPTATION DU NOUVEAU CODE DE DROIT CANON.

« En suivant les critères énoncés ci-dessus (III, 5), ainsi que le canon 21 du Code, nous promettons de respecter la discipline commune de l’Eglise et les lois ecclésiastiques, spécialement celles qui sont contenues dans le Code de droit canonique promulgué par le pape Jean-Paul II (1983) et dans le code de droit canon des Eglises orientales promulgué par le même Pontife (1990), restant sauve la discipline à concéder à la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X par une loi particulière. »

Mgr Fellay, comme d’habitude, s’est contenté d’emprunter la quasi-totalité de ce point au PD1 de Rome, sauf qu’il a ajouté au début « En suivant les critères énoncés ci-dessus (III, 5), ainsi que le canon 21 du Code ».

Est-ce que cet ajout « neutralise » le texte qui suit ?

Nous ne le croyons pas, car nous avons déjà démontré que précisément le point III, 5 est la pire partie du pire paragraphe !

Ensuite, voici ce que dit le canon 21 du nouveau Code (1983), que cite Mgr Fellay en sa faveur :

« En cas de doute, la révocation d’une loi en vigueur n’est pas présumée, mais les lois nouvelles doivent être rapprochées des lois antérieures et, autant que possible, conciliées avec elles. »

En d’autres mots : en cas de doute sur la révocation d’une loi de l’ancien Code, le nouveau Code devrait « rapprocher » ou « concilier » les deux lois. (*)

(*) Une dérogation est la révocation partielle d’une loi, mais l’abrogation est la révocation totale ou abolition d’une loi.

C’est un faux espoir de penser que Mgr Fellay, tout en acceptant le nouveau Code, obtiendra la possibilité de garder certaines lois de l’ancien Code.

La première raison, est que le nouveau Code dit ceci :

« Can. 6 – § 1. Avec l’entrée en vigueur du présent Code, sont abrogés:

1. le Code de droit canonique promulgué en 1917;

2. les autres lois universelles ou particulières, contraires aux dispositions du présent Code, à moins d’une autre disposition expresse concernant les lois particulières ; (…) »

On voit donc clairement que dans le n°1, l’ancien Code est explicitement abrogé, c’est-à-dire, supprimé.

Est-ce que Mgr Fellay, grâce au n°2, pourrait obtenir quelques dérogations ou exceptions, concernant par exemple les ordres mineurs, ou le sous-diaconat, ou quelques lois purement disciplinaires ? Peut-être, mais cela ne compense pas son acceptation de beaucoup de dispositions du nouveau Code qui sont gravement contraires à la Foi et à la pratique traditionnelle de l’Eglise (comme le mentionnait Mgr Lefebvre).

Et plus concrètement, lors d’une difficulté, le dernier mot reviendra à la Rome conciliaire !

Mgr Fellay rêve-t-il que la Fraternité puisse continuer à utiliser « en parallèle » l’ancien et le nouveau code ? Est-ce que le nouveau Code serait un bon instrument pour garder la Tradition, alors qu’il est précisément fait pour mettre en place les doctrines nouvelles ? Les ralliés ont-ils obtenu la faveur d’user du code de 1917 ?

 

C’est là encore une nouvelle « reculade » de Mgr Fellay : il change d’avis sur un point important. Voici ce qu’il affirmait sur le nouveau Code dans le Préliminaire à son PD2 du 30 novembre 2011 :

« … retrouvant dans le Droit canon de 1983 les mêmes ambiguïtés que dans le Concile, nous exprimons les mêmes réserves et demandons à pouvoir nous en tenir au Droit canon de 1917, avec les adaptations disciplinaires qui vont de soi ».

Et dans sa lettre du 12 janvier 2012, avec le complément d’information, Mgr Fellay était également très critique au sujet du nouveau Code :

« Le Droit canon promulgué en 1983 qui, dans la mesure où il reprend les nouveautés du concile, présente les mêmes difficultés » que les erreurs conciliaires et la nouvelle Messe.

Dans ces deux textes Mgr Fellay maintenait encore la position invariablement ferme de la Fraternité depuis 1983 sur le nouveau Code : nous gardons l’ancien Code de 1917.

Mais, maintenant avec la DD il a totalement changé d’avis ! Il n’est plus question « d’ambigüités » ou de « réserves » sur le nouveau Code. Il ne nous reste qu’à demander des « miettes » à nos ennemis avec quelques dérogations, mais il nous faudra avaler le poison du nouveau Code.

 

Voyons maintenant pourquoi nous ne pouvons pas accepter en conscience le nouveau Code, même avec les « restrictions » proposées par Mgr Fellay.

Mgr Fellay n’ignore pas la nocivité du nouveau Code, car non seulement il l’a étudié, mais il a vu, comme nous tous, ses effets néfastes.

Le nouveau Code est la mise en langage « juridique » de toutes les erreurs conciliaires. C’est pourquoi ce serait une contradiction de prétendre que l’on rejette le concile, et qu’en même temps on accepte la « législation » qui met en place les erreurs conciliaires ! Dans ce sens, le nouveau Code est plus dangereux que le concile lui-même.

Voici ce que Mgr Lefebvre avait affirmé maintes fois sur la perversité du nouveau Code :

« Alors, qu’est-ce que nous devons penser de cela ? Eh bien, c’est que ce [nouveau] droit canon est inacceptable ». (Conférence Spirituelle à Ecône, 99B, 14 mars 1983)

« …Le nouveau droit ne demande plus à un ménage mixte protestant catholique de signer un engagement comme quoi les enfants seront baptisés catholiques, c’est une atteinte grave à la foi, une atteinte grave à la foi (…) Dans le nouveau droit canon, il y a deux pouvoirs suprêmes de l’Église : il y a le pouvoir du pape qui a le pouvoir suprême et ensuite le pape avec les évêques. (…) Ça ne s’est jamais vu dans l’Église. (…) C’est donc limiter le pouvoir du pape. Alors, la note explicative du Concile, pratiquement, on n’en tient pas compte dans le nouveau droit canon ». (Conférence Spirituelle à Ecône, 100A, 20 mai 1983)

« L’ouvrage, qu’est le [nouveau] Code, concorde parfaitement avec la nature de l’Église, surtout telle qu’elle est proposée par le Concile Vatican II. Bien plus, ce nouveau Droit peut être conçu comme un effort pour exposer en langage canonique cette doctrine, c’est-à-dire l’Ecclésiologie conciliaire… (…) C’est l’autorité du Pape et des Évêques qui va en souffrir, c’est aussi la distinction du clergé et du laïcat qui s’amenuise, c’est le caractère absolu et nécessaire de la foi catholique qui s’atténue au profit de l’hérésie et du schisme, et les réalités fondamentales du péché et de la grâce qui s’estompent ». (Lettre aux Amis et Bienfaiteurs n° 24 de mars 1983)

« On y découvre une conception entièrement nouvelle de l’Église. (…) Et la définition de l’Église est celle-ci (canon 204) : « Les fidèles sont ceux qui, en tant qu’incorporés au Christ par le baptême, sont constitués en peuple de Dieu, et qui, pour cette raison, faits participants à leur manière de la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ, sont appelés à exercer la mission que Dieu a confiée à l’Église pour l’accomplir dans le monde. » […] Il n’y a plus de clergé. Que devient donc le clergé ? […] Il est donc facile de comprendre que cela est la ruine du sacerdoce et la laïcisation de l’Église. […] C’est ce qu’ont fait Luther et les protestants, qui ont laïcisé le sacerdoce. C’est donc quelque chose de très grave. (…) Vous savez que, dans le Code de droit canonique, il est permis à un prêtre de donner la communion à un protestant. (Canon 844) C’est ce qu’ils appellent « l’hospitalité eucharistique ». Il s’agit de protestants qui demeurent tels, non pas de ceux qui se convertissent. Cela est directement opposé à la foi ». (Conférence, Turin, 24 mars 1984)

« On y retrouve [dans le nouveau Code] la doctrine déjà suggérée par le document Lumen Gentium du Concile, selon laquelle le collège des évêques joint au pape jouit comme lui du pouvoir suprême dans l’Église, et cela d’une manière habituelle et constante. » (Lettre ouverte aux Catholiques perplexes, 1985, ch. 12)

« Notre cri d’alarme était rendu plus véhément encore par les errances du nouveau droit canon, pour ne pas dire ses hérésies. » (Ibid. ch. 21)

 

Ainsi donc, en acceptant le nouveau code de Droit Canon, Mgr Fellay accepte implicitement toutes les erreurs et déviations du nouveau Code de droit canon, qui concernent:

       La conception protestante de l’Église comme « Peuple de Dieu » ;

       L’autorité de deux pouvoirs suprêmes gouvernant l’Église ;

       La collégialité à tous les niveaux ;

       La laïcisation de l’Église ;

       Les prescriptions œcuméniques et en particulier « l’hospitalité eucharistique » ;

       Les nouvelles causes de nullité du Mariage ;

       Les nouvelles régulations concernant le mariage ;

       Les décisions des Tribunaux de mariage ;

       La suppression du Sous-diaconat, des ordres mineurs et de la tonsure ;

       Les nouvelles « canonisations » ;

       Le relâchement des lois disciplinaires ;

       Le contrôle des évêques diocésains et de Rome ;

Etc., etc.

Donc, l’acceptation par Mgr Fellay de se soumettre au nouveau Code de droit canon sera le plus grand obstacle pratique pour la Fraternité si elle veut continuer  à remplir sa fonction de préserver la Tradition et de combattre les erreurs conciliaires.

 

Après avoir analysé le contenu de la Déclaration Doctrinale nous sommes stupéfaits de constater que Mgr Fellay, par ce document, officialise l’acceptation de tout ce contre quoi nous nous sommes toujours battus : le concile, la nouvelle Messe et le nouveau Droit canon.

Voici les différents points sur lesquels il a cédé :

Dans le Paragraphe I, il promet fidélité à « l’église conciliaire », et au Pape, tête de cette même « église ».

Dans le Paragraphe II, il accepte de se soumettre aux enseignements du « magistère » conciliaire et post-conciliaire, d’après la doctrine du n° 25 de Lumen gentium :

Dans le Paragraphe III, il accepte toutes les questions controversées majeures :

          L’autorité collégiale du pape et des évêques ;

          L’autorité du « magistère » de « l’église conciliaire » ;

          Le « progrès » de la Tradition selon les néo-modernistes ;

           le critère d’interprétation entre la Tradition et les textes du Concile Vatican II en général, c’est-à-dire, « l’herméneutique de la continuité » ;

           « l’herméneutique de la continuité » comme critère d’interprétation entre la Tradition et les textes du Concile sur l’œcuménisme et de la liberté religieuse ;

           Repousser les discussions doctrinales à plus tard ;

           L’acceptation de la « validité » et de la « légitimité » de la nouvelle Messe et des nouveaux sacrements

           L’acceptation du nouveau Code de droit canon.

 

Rien n’a été laissé de côté dans ce que Rome attendait ! Tout y passe !

On voit bien que Mgr Fellay s’est appliqué sérieusement à satisfaire les demande du Cardinal Levada, qui dans sa lettre du 16 mars 2012, l’invitait « à réfléchir aux graves conséquences de [sa] prise de position, au cas où elle serait définitivement confirmée » et à « reconsidérer [sa] position ».

Mgr Fellay confirme ainsi son « nouveau positionnement par rapport à l’Église officielle » comme il l’avait écrit dans le Cor Unum 101 (Mars 2012).

Par ce compromis doctrinal grave, tous les bastions de la Tradition tombent… C’est la trahison de celui qui était censé les défendre.

Ce n’est donc pas une surprise si un tel document a provoqué, et continue de provoquer, tant de vives réactions parmi ceux qui ne veulent pas de compromis avec la Rome moderniste.

 

Nous verrons dans la TROISIEME PARTIE les conséquences immédiates et à long terme qu’a provoqué la Déclaration doctrinale.

Ensuite, avant de conclure, nous répondrons aux objections de ceux qui prennent la défense de la Déclaration et des agissements de Mgr Fellay.

 

Sacerdos

 (à suivre)